Par un arrêt du 23 mars 2015, la cour d'appel de Bordeaux a jugé que l’assurance emprunteur pouvait être résiliée annuellement. Sébastien Robineau, Avocat associé, Homère et Martin Lacour, Avocat, Homère commentent cette décision.
Le 23 mars dernier, la Cour d’appel de Bordeaux a donné raison à un particulier qui avait manifesté sa volonté de résilier son assurance emprunteur, la première année passée (pour consulter la décision, cliquer ici). Pour rappel, l'assurance emprunteur permet de garantir le remboursement d'un prêt en cas de perte brutale de revenus (par exemple, en cas décès de l'emprunteur, perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité...). Les enjeux financiers liés à cette décision pourraient se révéler très importants, pour ne pas dire colossaux, tant pour les banques que pour les assureurs.
La Cour d’appel de Bordeaux juge ainsi que les contrats d’assurance emprunteur de groupe peuvent être résiliés à l’échéance annuelle, comme les autres contrats d’assurances régis par les dispositions de l’article L. 113-12, alinéa 2 du Code des assurances. Ce texte prévoit, en substance, que l’assuré peut résilier le contrat à l’expiration d’un délai d’un an. Le texte précise que l’assuré doit alors envoyer une lettre recommandée à l’assureur au moins deux mois avant la date d’échéance.
En l’espèce, le particulier avait contracté en novembre 2010 deux prêts immobiliers auprès d’une banque, le CIC Sud-Ouest. Ces prêts étaient garantis par son adhésion à un contrat d’assurance de groupe des ACM, contrat distribué par la banque. Le particulier ayant eu connaissance d’une offre de police d’assurance économiquement plus avantageuse, il manifeste sa volonté de mettre fin à la police emprunteur en octobre 2012, par lettre recommandée. La banque refuse alors la substitution, prétendant que la résiliation ne serait pas possible. Elle estime en effet, sur le fondement d’un texte du code de la consommation, l’article L. 312-9, que la faculté de présenter un autre contrat d’assurance que celui proposé par la banque n’est ouverte à l’emprunteur qu’au moment de la formation du contrat, et non au cours de son exécution.
La Cour d’appel de Bordeaux rappelle qu’il n’est pas possible de déroger à l’article L.113-12 du Code des assurances, et juge par conséquent que la banque et l’assureur « ne peuvent […] valablement invoquer les conditions générales du contrat de prêt, soumettant la résiliation de l’adhésion par l’emprunteur à l’accord du créancier, pour légitimer le refus de la résiliation ». On ignore encore si un pourvoi sera présenté à la Cour de cassation contre cette décision, mais cela est probable, compte tenu des enjeux financiers.
Le droit applicable à cette décision est celui antérieur à l’entrée en vigueur des dispositions de la loi Hamon du 17 mars 2014. Cette dernière introduit la possibilité pour le consommateur de changer l’assurance de son prêt immobilier durant une période d’un an après la signature du prêt. Se pose donc la question de l’articulation de ces deux solutions. Selon nous, les deux facultés seront ouvertes : le consommateur pourra par conséquent se prévaloir, soit de la décision de la Cour d’appel de Bordeaux – sous réserve d’une éventuelle censure par la Cour de cassation, soit des dispositions de la loi Hamon.
Sébastien Robineau, Avocat associé, Homère et Martin Lacour, Avocat, Homère