La spécificité des systèmes de rémunération des associés des cabinets d’avocats d’affaires français indépendants

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Une étude menée par Bignon De Keyser et le cabinet MGX sur les modes de rémunération des associés des cabinets d'avocats d'affaires français indépendants met en exergue une grande diversité et des différences importantes avec les systèmes de rémunération des cabinets internationaux.

Deux systèmes de rémunération sont majoritairement utilisés par les cabinets d'avocats d'affaires :
- Le lock-step basé sur un système de répartition des bénéfices entre associés qui vient des cabinets d’avocats britanniques. Les revenus sont partagés entre tous les associés selon le critère de l’ancienneté de chaque associé. 
- Le système dit du « eat what you kill » basé sur la rentabilité des avocats issu des cabinets d’avocats américains

Qu’en est-il de la rémunération des associés des cabinets d’avocats d’affaires français indépendants ?
Selon les résultats d’une enquête sur les systèmes de rémunération des associés des cabinets d’avocats d’affaires français indépendants réalisée par le cabinet de conseil en stratégie et organisation dédié aux professions juridiques Bignon De Keyser et le cabinet MGX d’expertise et de conseil financier, ces dispositifs se caractérisent par leur grande hétérogénéité et par leur complexité, qui induit un manque de lisibilité et s’accompagne parfois d’une certaine opacité.
Si le système de rémunération est dans la quasi-totalité des cas décrit dans un document interne (statuts, accord d’association ou autre), il ne l’est souvent que de façon partielle. Un peu plus de la moitié des cabinets interrogés disposent d’un “comité des rémunérations”, qui comprend des membres indépendants du management dans les 2/3 des cas.
Près des 2/3 des cabinets interrogés ont créé plusieurs catégories d’associés afin d’être en mesure de proposer des statuts alternatifs et/ou évolutifs avec des associations à plusieurs niveaux. La rémunération des associés non equity est souvent moins dépendante du résultat, même s’il arrive parfois que le système de rémunération des associés equity et non equity soient identiques (hormis l’accès au capital). Quel que soit le système choisi, les associés equity ont toujours connaissance de l’ensemble des rémunérations du cabinet, ce qui n’est pas toujours le cas des associés non equity.
Les résultats de l’étude montrent également que les systèmes de rémunération retenus sont très variables d’un cabinet à l’autre, y compris lorsqu’ils s’appuient sur les mêmes paramètres (mais sur des bases de calcul ou des pourcentages différents). Ainsi, il existe non seulement des systèmes très calculatoires et relativement transparents mais aussi des systèmes plus discrétionnaires dans lesquels les associés fondateurs ont une large influence sur les rémunérations. « Certains systèmes sont très complexes et donnent l’impression de présenter une certaine opacité et de rester à la main de ceux qui les maîtrisent », observe Patrick Bignon (Bignon De Keyser).

En ce qui concerne la méthode de calcul, le principe du lockstep pur perd du terrain au profit de systèmes mixtes visant à mieux récompenser les performances individuelles
Les 3/4 des cabinets d’avocats interrogés ont choisi un système d’allocation en deux parties.
La première, souvent qualifiée de “fixe” et dont l’objectif est de garantir la cohésion interne, est constituée d’un versement mensuel fixe (pour 58% des cabinets concernés) ou progressif (42%) en fonction d’un principe de lockstep (progression basée sur l’ancienneté au sein du cabinet) plus ou moins aménagé. La seconde, destinée à récompenser les performances individuelles, est calculée sur la base de formules plus ou moins complexes (dans 58 % des cabinets concernés) ou en fonction d’une décision managériale (42%) plus ou moins partagée et consensuelle.
Au final, les systèmes de rémunération existants sont quasiment tous différents et la proportion entre ces deux parties est très variable, la part fixe pouvant représenter de 33% à 90% du montant total de la rémunération.
1/4 des cabinets du panel appliquent un système basé sur une allocation unique, calculée en fonction d’une règle de répartition des encaissements dans les “compteurs” des associés (pour 25% des cabinets concernés) ou en fonction d’une décision ou recommandation du management (75%).
Plus fréquente dans les cabinets développés autour d’une ou deux personnalités, cette dernière option « n’exclut pas que la décision s’élabore de façon consensuelle après plusieurs allers-retours », relève Patrick Bignon.
Tous les cabinets interrogés versent des acomptes, généralement mensuels (notamment si la rémunération prévoit un “fixe” mensuel) et règlent le solde en une ou plusieurs fois au cours de l’année n+1.

Quel système faut-il privilégier ? « S’il n’y a pas de “meilleur système” dans l’absolu, le système utilisé et sa lisibilité par les associés peuvent, en fonction de sa cohérence avec la nature des activités, des ambitions et de la stratégie du cabinet, être un frein au développement ou, au contraire, un catalyseur actif », estime Patrick Bignon.
Or, « les systèmes de rémunération en place sont souvent le fruit d’une histoire et d’une alchimie complexe, ce sont un des facteurs d’équilibre interne, et c’est pourquoi les cabinets hésitent souvent à les faire évoluer, même s’il existe souvent des réflexions en cours – en particulier dans les structures qui comment à songer à la succession de leurs associés historiques »

Arnaud Dumourier (@adumourier)


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