Le conseil de prud’hommes de Paris a ordonné au PSG de verser 60,9 millions d’euros à Kylian Mbappé, tout en rejetant la demande astronomique du club qui réclamait 440 millions au joueur. Explications par Audrey Belmont, avocate of counsel chez Capstan.
Le Paris Saint-Germain a été condamné, mardi 16 décembre, par le conseil des prud’hommes à verser à Kylian Mbappé 60,9 millions d’euros de salaires et primes impayés lors de la saison 2023-2024.
Les termes du délibéré rendu par le conseil de prud’hommes de Paris paraissent conformes à ce que l’on pouvait en attendre :
a) Les salaires et primes de signature et d’éthique restaient dus au joueur dès lors que les conditions auxquelles le club s’était contractuellement engagé étaient remplies ; l’arrivée du terme du contrat de Kylian Mbappé n’était pas un évènement qui, en soi, permettait au club d’éviter leur paiement, quels que soient les espoirs — déçus — qu’il avait pu nourrir à l’égard d’une éventuelle prolongation de son contrat ;
b) Le rejet de la demande de Kylian Mbappé de requalification de son CDD en CDI n’est pas surprenant.
Les contrats de travail des sportifs professionnels sont obligatoirement conclus dans le cadre d’un CDD spécifique réglementé par le code du sport (C. sport, art. L. 222-2-3), qui exclut par ailleurs l’application de nombreuses dispositions du code du travail encadrant le recours au CDD de droit commun (C. sport, art. L. 222-2-1). Le CDD spécifique est la forme exclusive d’emploi des joueurs et entraîneurs professionnels – et non le CDI.
La perspective d’une requalification du CDD de Kylian Mbappé en CDI semblait donc réduite et la décision prud’homale participe d’une sécurisation de la relation contractuelle entre clubs et sportifs professionnels, qu’il convient de saluer ;
c) Les demandes de Kylian Mbappé pour harcèlement moral, travail dissimulé et exécution déloyale du contrat de travail ont été jugées non fondées ; sur cette dernière demande, la décision aurait pu être différente compte tenu du non-paiement des salaires sanctionné par ailleurs par la juridiction ;
d) Le rejet des demandes de condamnation formées contre Kylian Mbappé à hauteur de 440 millions d’euros n’est, lui aussi, pas une surprise dès lors qu’elles s’appuyaient sur un engagement verbal invoqué par le club ;
e) L’exécution provisoire de la totalité de la décision paraît sévère au regard du montant des condamnations salariales, mais elle s’explique sans doute par le fait que la juridiction a voulu empêcher le club de différer davantage, grâce à l’exercice d’un appel contre sa décision, le paiement de ce qu’elle a estimé être dû à Kylian Mbappé depuis plus de 18 mois ;
f) La publication du jugement est une mesure rarement ordonnée par les juridictions en dehors des affaires de presse. Elle s’explique par l’importante médiatisation du dossier et son impact sur l’image du joueur comme du club auprès du public, mais elle reste une mesure étonnante dans un litige prud’homal.
Le conseil de prud’hommes a rendu une décision qui paraît au final relativement équilibrée si l’on fait abstraction des montants en jeu. Les juges semblent avoir voulu rétablir Kylian Mbappé dans ce qui lui était strictement dû, en excluant les demandes des deux parties qui ont pu lui paraître relever davantage d’une stratégie judiciaire.
Un appel présente a priori peu d’intérêt pour le PSG compte tenu à la fois des très faibles chances d’infirmation de la décision et de l’exécution provisoire des condamnations, qui auront dû être réglées entre temps par le club.
Audrey Belmont, avocate of counsel chez Capstan
