Le Conseil constitutionnel juge que les dispositions législatives relatives à la notification de son droit de se taire à l’accusé interrogé par un magistrat instructeur dans le cadre d’un supplément d’information à la suite d’une condamnation par défaut non avenue, doivent être déclarées contraires à la Constitution avant le 1er mars 2022 et conformes à celle-ci à compter de cette date.
Le Conseil constitutionnel a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité à la Constitution des quatre premiers alinéas de l’article 114 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-993 du 17 août 2015 portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne.
Selon l’article 379-4 du code de procédure pénale, lorsque l’accusé condamné par défaut en raison de son absence se constitue prisonnier ou est arrêté avant que la peine soit éteinte par la prescription, l’arrêt de la cour d’assises est non avenu dans toutes ses dispositions et il est procédé à son égard à un nouvel examen de l’affaire conformément aux dispositions des articles 269 à 379-1 du même code.
En application de son article 283, le président de la cour d’assises peut alors ordonner un supplément d’information et y procéder lui-même ou déléguer à cette fin un de ses assesseurs ou un juge d’instruction.
En premier lieu, il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que, avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021, ni les dispositions contestées de l’article 114 du code de procédure pénale ni aucune autre disposition législative ne prévoyaient la notification du droit de se taire à l’accusé qui est interrogé, dans ce cadre, par le magistrat instructeur pour la première fois.
Or, d’une part, dans le cadre d’un tel supplément d’information, le magistrat instructeur est amené à interroger l’accusé sur les faits qui lui sont reprochés.
D’autre part, ce dernier est susceptible, en réponse aux questions qui lui sont posées, de reconnaître ces faits. En outre, la seule circonstance que le magistrat instructeur l’invite à répondre à ses questions et à présenter des observations peut être de nature à lui laisser croire qu’il ne dispose pas du droit de se taire.
Enfin, les déclarations ou les réponses faites dans ce cadre par l’accusé sont portées à la connaissance de la juridiction de jugement.
Par conséquent, en ne prévoyant pas que l’accusé doit être informé de son droit de se taire, le législateur a méconnu, pendant cette période, les exigences de l’article 9 de la Déclaration de 1789.
Toutefois, en second lieu, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 2021, en matière de crime ou de délit, le droit de se taire doit être notifié à la personne poursuivie avant tout interrogatoire lors de sa première présentation devant un magistrat, en application de l’article préliminaire du code de procédure pénale.
L’entrée en vigueur de ces dispositions le 1er mars 2022 a donc mis fin à l’inconstitutionnalité constatée.
Depuis cette date, les dispositions contestées ne méconnaissent plus les exigences de l’article 9 de la Déclaration de 1789. Elles ne sont pas non plus entachées d’incompétence négative et ne méconnaissent ni les droits de la défense, ni les principes d’égalité devant la loi et devant la justice, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit.
Le Conseil constitutionnel juge, dans une décision n° 2025-1136 QPC du 30 avril 2025, que les dispositions contestées doivent être déclarées contraires à la Constitution avant le 1er mars 2022 et conformes à celle-ci à compter de cette date.
La remise en cause des mesures ayant été prises sur le fondement des dispositions déclarées contraires à la Constitution méconnaîtrait les objectifs de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions et aurait ainsi des conséquences manifestement excessives. Par suite, ces mesures ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité.
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