Une cour d'appel ne peut présumer de la sincérité de la déclaration de succession que les demandeurs avaient établie pour en demander la réduction sans inverser la charge de la preuve de son caractère excessif.
Un donataire a octroyé à la commune de Talloires des droits de nue-propriété d'un ensemble d'immeubles. Après son décès, ses héritiers, enfants de sa fille, ont demandé la réduction de cette donation pour atteinte à la réserve.
La cour d’appel de Chambéry a dit que la valeur des biens donnés était de 7.385.000 euros et qu'elle excédait la quotité disponible, de sorte que la commune doit aux héritiers une somme de 3.105.904 euros.
Pour cela, les juges du fond n’ont pas estimé utile d'étendre l'expertise à la totalité du patrimoine composant la succession dès lors que les héritiers produisent la déclaration de succession à laquelle s'attache une présomption de sincérité et que les évaluations qui y figurent ne paraissent guère sujettes à discussion, alors que la commune de Talloires n'en conteste pas les termes.
Dans un arrêt du 9 juillet 2014, la Cour de cassation censure la décision des juges du fond au visa des articles 920, 922 et 1315 du code civil.
En effet, la commune, qui faisait valoir que l'indemnité de réduction due était de 1.402.521,90 euros, contestait nécessairement les termes de la déclaration de succession sur laquelle s'appuyaient les héritiers. La cour d'appel ne pouvait donc présumer de la sincérité de cet acte qu'ils avaient établi sans inverser la charge de la preuve du caractère excessif de la libéralité dont ils se prévalaient pour en demander la réduction.