Un bailleur doit présenter, dès l’instance relative à sa première demande, la condamnation solidaire des preneurs, car si ce n’est fait qu’à la seconde demande, cela sera interprété comme une remise en cause d’une décision revêtant l’autorité de la chose jugée.
Un tribunal de grande instance a condamné les titulaires d’un bail à payer au bailleur plusieurs sommes, en exécution du contrat.
La liquidation judiciaire d’un des preneurs a été prononcée le 14 juin 2013, puis a été clôturée pour insuffisance d’actifs le 13 novembre 2015. Le bailleur a reçu un certificat d’irrecouvrabilité à la suite de sa déclaration de créance.
Celui-ci a réussi à saisir les rémunérations du travail d'un des deux preneurs et a assigné ceux-ci le 11 mai 2017, pour qu’ils soient solidairement tenus de leurs dettes locatives, arrêtés par un jugement du 21 janvier 2013.
La cour d’appel de Chambéry a considéré que l’action du requérant était recevable.
Elle a considéré qu’il n’était pas possible de déduire de l’absence d’invocation de solidarité entre les preneurs, lors de l’instance précédente, que le bailleur aurait renoncé à se prévaloir de cette modalité de sa créance.
Par ailleurs, elle a relevé que le jugement du 21 janvier 2013 avait reconnu que le requérant détenait une créance à l’encontre des preneurs. Ainsi, sa demande ne tendait pas à la reconnaissance même du droit car, s’il se prévaut toujours de la même créance à l’égard des mêmes personnes, il implique une solidarité entre elles et modifie, en la confortant, la consistance de son droit.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 19 mai 2022 (pourvoi n° 21-13.062), casse et annule l’arrêt d’appel au visa de l’article 1355 du code civil.
Ce texte dispose que le demandeur doit présenter, dès l’instance relatif à la première demande, l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à la fonder.
En l’espèce, la Cour considère qu’il appartenait au bailleur de solliciter, dès la première instance, la condamnation solidaire des débiteurs.
Ainsi, la seconde demande, portant sur la condamnation solidaire des preneurs, ne tendait qu’à remettre en cause, en-dehors de l’exercice d’une voie de recours, par un moyen qui n’avait pas été invoqué devant le tribunal, une décision revêtant l’autorité (...)