Viole le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime l'arrêt d'appel qui indemnise la victime au titre du préjudice d'établissement et du préjudice sexuel, qualifiés de "provisoires" : ces chefs de préjudice ne peuvent être réparés qu'au titre des préjudices permanents après consolidation et la somme allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire intègre nécessairement le préjudice sexuel avant consolidation.
Grièvement blessé par l'explosion d'un engin pyrotechnique lors d'une fête, un sapeur-pompier volontaire a assigné l'association organisatrice et son assureur en responsabilité et indemnisation de ses préjudices.
Il est décédé des suites de ses blessures.
Sa mère et ses frères sont intervenus volontairement à l'instance, tant à titre personnel qu'en leur qualité d'ayants droit.
La cour d'appel de Montpellier a condamné l'assureur, in solidum avec l'association, à payer aux ayants droit, au titre de l'action successorale, la somme de 60.000 € en réparation du préjudice sexuel et du préjudice d'établissement, qualifiés de provisoires.
Les juges du fond ont constaté que, même si son état de santé n'avait jamais pu être considéré comme consolidé, la victime avait, avant l'accident, une vie sentimentale correspondant aux attentes d'un jeune homme de 26 ans et que, postérieurement à l'accident, compte tenu des séquelles physiques et de la lourdeur de son handicap, la relation avec sa compagne avait cessé. Elle n'avait pu au cours des neuf ans qui avaient suivi, en raison notamment des séquelles esthétiques dont elle était atteinte, renouer une relation sentimentale et construire le projet de vie familiale auquel elle pouvait légitimement prétendre.
La Cour de cassation reproche aux juges du fond d'avoir indemnisé deux fois les mêmes préjudices et ainsi méconnu le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime en indemnisant, outre le poste de déficit fonctionnel temporaire, un poste de préjudice sexuel et d'établissement avant consolidation.
Dans son arrêt du 25 avril 2024 (pourvoi n° 22-17.229), elle précise en effet que le préjudice d'établissement constitué par la perte d'espoir et de chance de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap subsistant après consolidation est un poste de (...)