Constitue un trouble anormal du voisinage les nuisances consistant, après la modification importante des conditions d'exploitation résultant de l'augmentation du cheptel et de la localisation des nouveaux bâtiments, en des odeurs nauséabondes, des bruits d'animaux, de machines, et aussi en la présence envahissante d'insectes.
Une exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) gérant une exploitation agricole dont l'objet principal est l'élevage de bovins a fait construire deux bâtiments pour accueillir les animaux.
La juridiction administrative a annulé les permis de construire qui avaient été délivrés à l'EARL.
Se plaignant de bruits, d'odeurs et de la présence d'insectes en provenance de l'exploitation, des riverains ont assigné l'EARL en démolition des bâtiments et paiement de dommages-intérêts.
La cour d'appel d'Amiens a condamné l'EARL à payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice généré par le trouble anormal de voisinage.
Les juges du fond ont rappelé que les dispositions de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, dans leur rédaction issue de la loi n° 2021-85 du 29 janvier 2021 visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises, concernent la protection des espaces, ressources et milieux naturels et n'ont ni pour objet ni pour effet d'exonérer les exploitants agricoles de la responsabilité qu'ils encourent lorsque les nuisances générées par leur exploitation excèdent, compte tenu de la situation des fonds, les inconvénients normaux du voisinage.
En l'espèce, ils ont constaté que l'EARL avait construit une stabulation en aire paillée intégrale comprenant une partie pour loger l'ensemble des vaches laitières avec un bloc "traite" et une fosse sous caillebotis et une partie destinée au logement des génisses et des bovins à l'engraissement, avec une façade complète ouverte sur l'extérieur, et que le cheptel de l'exploitation était passé d'un maximum de 160 bovins à une moyenne de 250 animaux.
Ils ont relevé que la nouvelle stabulation se situait à une distance comprise entre 21 et 96 mètres de 22 habitations et que, compte tenu de cette proximité, les permis de construire avaient été annulés, dès lors qu'ils étaient de nature à porter atteinte à la salubrité publique, nonobstant la dérogation préfectorale obtenue par (...)