La commission de l'intelligence artificielle formule 25 recommandations pour renforcer la position de la France en matière d'IA

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Philippe Aghion, économiste spécialiste de l’innovation et Anne Bouverot, présidente du conseil d’administration de l'ENS, ont remis à Emmanuel Macron, président de la République, ce mercredi 13 mars 2024, le rapport de la commission de l’intelligence artificielle qui formule une vision stratégique afin de renforcer la position de la France en matière d’intelligence artificielle (IA).

Le président Emmanuel Macron a reçu un rapport sur l'intelligence artificielle (IA), un domaine où la France ambitionne de devenir un leader mondial.

Pour la France, l'IA est considérée comme un pilier central de la stratégie nationale depuis 2017. Le rapport de Cédric Villani, "IA for humanity", avait déjà posé les bases d'une ambition nationale avec un plan de 1,5 milliard d'euros, marquant le début d'un engagement profond dans la recherche, la régulation, et la coopération internationale en matière d'IA.

La France se positionne déjà comme une force européenne en IA, forte de ses 600 startups, de ses entreprises innovantes telles que Shift Technologie et Alan, et de l'investissement de géants technologiques comme Meta et Google. La présence de talents, la capacité de calcul avec des supercalculateurs comme Jean Zay, et un accent sur les données et la recherche font de la France un écosystème dynamique. L'accent mis sur l'énergie décarbonée renforce également la compétitivité du pays dans un domaine énergivore.

Une stratégie fondée sur six axes

Le rapport propose une vision stratégique pour renforcer la position de la France en IA, s'articulant autour de six axes principaux :

1. Formation et sensibilisation : lancer immédiatement un plan de sensibilisation et de formation de la nation

La commission souligne l'importance cruciale de l'éducation et de la sensibilisation à l'IA pour tous les secteurs de la société française. Un plan ambitieux est recommandé pour développer non seulement des experts en IA capables de concevoir et de développer des technologies avancées, mais aussi pour assurer que le grand public et les décideurs comprennent les principes fondamentaux de l'IA, ses avantages, et ses défis. Cela implique des initiatives telles que l'intégration de l'IA dans les programmes scolaires, la formation continue pour les professionnels, et des campagnes de sensibilisation ciblant la population générale.

2. Financement de l'innovation : réorienter structurellement l’épargne vers l’innovation  et créer, à court terme, un fonds« France & IA » de 10 Md€ 

Le rapport met en lumière la nécessité de canaliser davantage de ressources financières vers l'innovation en IA. Il s'agit de réorienter l'épargne nationale vers des investissements à haut risque et à haut rendement dans le domaine de l'IA, pour soutenir les startups ainsi que les initiatives de recherche et développement. Cette démarche vise à créer un environnement propice à l'émergence et à la croissance d'entreprises innovantes en IA, renforçant ainsi l'écosystème technologique français.

3. Puissance de calcul : faire de la France un pôle majeur de la puissance de calcul

La commission recommande d'augmenter significativement les capacités de calcul de la France, avec pour objectif de positionner le pays comme un leader européen dans ce domaine. Cela inclut le soutien à des infrastructures de calcul de pointe, comme les supercalculateurs, et l'encouragement des investissements privés dans les centres de données. La puissance de calcul est essentielle pour le développement et le déploiement d'applications d'IA, notamment pour le traitement des grandes quantités de données nécessaires à l'apprentissage machine.

4. Accès aux données : faciliter l’accès aux données à caractère personnel et favoriser l’accès à des données culturelles dans le respect des droits de propriété intellectuelle

Un accès facilité à des données massives, fiables et manipulables est vital pour l'avancée de l'IA. Le rapport recommande de développer des politiques et des infrastructures qui garantissent cet accès tout en protégeant les droits des individus et la propriété intellectuelle. Cela comprend la promotion de l'open data gouvernemental, le soutien à la création de bases de données sectorielles, et la mise en place de cadres légaux pour le partage des données entre entités privées et publiques.

5. Recherche publique : assumer le principe d’une « exception IA » dans la recherche publique

La commission insiste sur l'importance de soutenir la recherche publique en IA par la réduction des contraintes administratives et l'augmentation des financements. L'objectif est de permettre aux chercheurs de se consacrer pleinement à l'innovation et de maintenir la France à la pointe du développement technologique. Cela implique aussi de renforcer les collaborations entre les institutions de recherche, les universités, et le secteur privé pour favoriser le transfert de connaissances et de technologies.

6. Gouvernance mondiale : promouvoir une gouvernance mondiale de l’IA

Le rapport aborde la question cruciale de la gouvernance mondiale de l'IA. Il propose la création d'organisations internationales et de fonds dédiés à l'IA, ainsi que des mécanismes de soutien pour les pays en développement. Ces initiatives visent à promouvoir une régulation éthique et équitable de l'IA à l'échelle mondiale, pour assurer que les avancées technologiques profitent à tous et minimisent les risques associés.

En définitive, le rapport remis au président Macron esquisse une stratégie ambitieuse pour solidifier le leadership de la France dans le domaine de l'intelligence artificielle. Il met l'accent sur la formation, l'innovation, les infrastructures, l'accès aux données, le soutien à la recherche et la coopération internationale comme piliers d'une approche holistique visant à maximiser les bénéfices de l'IA pour la société tout en adressant ses défis.

Arnaud Dumourier (@adumourier

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Composition de la commission de l’intelligence artificielle :

Coprésidents :
    • Philippe Aghion, économiste spécialiste de l’innovation ;
    • Anne Bouverot, présidente du conseil d’administration de l'ENS.
Membres :
    • Glles Babinet, Président du Conseil national du numérique
    • Joëlle Barral, directrice scientifique chez google
    • Alexandra Bensamoun, professeure de droit, personnalité qualifiée au CSPLA (ministère de la Culture)
    • Nozha Boujemaa, co-présidente du groupe d’experts IA de l’OCDE et Digital Trust Officer Décathlon
    • Bernard Charlès, D de Dassault Systèmes
    • Luc Julia, expert en intelligence artificielle générative
    • Yann Le Cun, VP et Chief AI Scientist chez Meta, expert de l’IA générative
    • Arthur Mensch, fondateur de Mistral
    • Cédric O, consultant, ancien Secrétaire d’Etat au Numérique
    • Isabelle Ryl, directrice du Paris Artificial Intelligence Research Institute (PRAIRIE, INRIA)
    • Franca Salis-Madinier, Secrétaire nationale de la CFDT Cadres en charge de l’Europe, du numérique, de l‘intelligence artificielle et de la protection des lanceurs d’alerte.
    • Martin Tisné, cofondateur de l’OP
    • Gaël Varoquaux, chercheur en informatique

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