Les conditions de fond du référé-suspension doivent être caractérisées. Ainsi, d’une part, il faut des raisons sérieuses de penser que la décision est illégale. D’autre part, la condition de l’urgence est satisfaite si la décision porte une atteinte suffisamment grave et immédiate aux intérêts du requérant.
Saisi d’une demande, par un syndicat, tendant à suspendre l’exécution des articles 1er, 3, 8, 10 et 16 de l’ordonnance du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective, le juge des référés du Conseil d’Etat était amené à statuer en référé-suspension sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative. Par une décision du 16 novembre 2017, ce dernier a débouté le requérant.
Tout d’abord, le juge des référés estime que les moyens soulevés par le syndicat et dirigés contre les articles 1er et 10 de cette ordonnance ne sont pas de nature à créer un doute sérieux sur leur légalité, en l’état de l’instruction.
L’article 1er a pour but de modifier la jonction entre conventions de branche et accords d’entreprise, en permettant surtout, dans certains domaines, que les accords d’entreprise puissent primer sur les conventions de branche. Il écarte en particulier comme non sérieux le moyen en vertu duquel l’article précité méconnaîtrait le principe selon lequel “la loi ne peut permettre aux accords collectifs de déroger aux conventions de portée plus générale que dans un sens plus favorable”, en alléguant que l’ordonnance litigieuse, par laquelle le gouvernement était habilité par le Parlement à intervenir dans le domaine législatif, pouvait aménager ou écarter ce principe qui est aussi de niveau législatif.
L’article 10 de l’ordonnance a quant à lui pour finalité la modification des règles de validation majoritaire des accords d’entreprise ou d’établissement, en prévoyant, sous certaines conditions, la possibilité pour l’employeur de demander lui-même une consultation des salariés afin de valider un tel accord. Dès lors qu’une telle consultation a lieu selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l’employeur et des organisations syndicales représentatives, le juge des référés écarte comme non sérieux le moyen tiré de ce que l’article précité porterait (...)