Un employeur ne peut pas menacer de licenciement un employé qui saisit la CEDH dans le cadre d'un litige salarial, car cette menace constitue une forme de "pression" et d’"intimidation" contraire à l’article 34 de la Convention EDH.
L'employé d'un parc national au Kosovo a saisi la Cour européenne des droits de l'Homme pour se plaindre de l’inexécution d’un jugement rendu en sa faveur en 2009 dans le cadre d’un litige portant sur des salaires impayés.
Invoquant également l’article 34 (droit de recours individuel), il soutenait que, peu après avoir introduit sa requête devant la CEDH, le directeur général du parc national lui a adressé une lettre d’avertissement lui indiquant qu’il avait manqué à ses devoirs et qu’il risquait le licenciement.
Dans un arrêt Boškoćević c/ Serbie du 5 mars 2024 (requête n° 37364/10), la Cour européenne des droits de l'Homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu violation de l’article 34 (droit de recours individuel) de la Convention européenne des droits de l’Homme.
Tout d'abord, la Cour ne souscrit pas à l’argument du gouvernement selon lequel il ne saurait être tenu pour responsable du comportement de l’employeur du requérant. L’employeur en question est un organisme public investi d’une mission d’intérêt public (préservation des ressources naturelles des monts Šar) dont le business plan annuel et les tarifs sont approuvés par le gouvernement. Il ne saurait donc être considéré comme une "organisation non gouvernementale".
De plus, la lettre d’avertissement adressée au requérant était signée par le directeur général du parc national et revêtue d’un sceau officiel.
Ensuite, la Cour rappelle que, pour que le mécanisme de recours individuel prévu par la Convention soit efficace, il est impératif que les requérants, déclarés ou potentiels, soient libres de communiquer avec elle sans que les autorités ne les pressent en aucune manière de retirer ou modifier leurs griefs.
De toute évidence, le requérant a été directement menacé de licenciement pour avoir saisi la CEDH et pour n’avoir pas communiqué copie de toute la correspondance y afférente.
La Cour conclut que ce type de communication constitue une forme de "pression" et d’"intimidation" contraire à l’article 34.