Un entretien filmé constitue en tant que tel une création protégée par le droit d'auteur dès lors qu'il revêt une forme originale. La personne interrogée peut se voir reconnaître la qualité de coauteur à la condition qu'il soit démontré qu'elle a contribué à l'originalité de celui-ci.
Dans le cadre de la préparation de sa thèse de doctorat sur "le cinéma et la vidéo saisis par le féminisme en France de 1968 à 1981", consacrée à l'histoire du groupe "Insoumuses", une étudiante a réalisé plusieurs entretiens filmés avec Carole Roussopoulos, une réalisatrice du collectif.
Ayant constaté qu'un film intitulé "Delphine et Carole, insoumuses", relatant la relation d'amitié entre la comédienne Delphine Seyrig et Carole Roussopoulos, décédée entre-temps, comportait plusieurs extraits de ces enregistrements audiovisuels, l'étudiante a assigné la société de production en indemnisation de l'atteinte portée à ses droits d'auteur.
La société a contesté, à titre principal, la recevabilité de cette action, en invoquant la qualité de coauteur de Carole Roussopoulos et l'absence de mise en cause des héritiers de celle-ci, et, à titre subsidiaire, la qualité d'auteur de l'étudiante.
La cour d'appel de Paris a jugé recevable l'action de l'étudiante et considéré que le film litigieux portait bien atteinte à ses droits patrimonial et moral.
Après avoir énoncé qu'il appartenait à la société d'apporter la preuve que l'interviewée avait participé à la conception, à la préparation ou à la direction des entretiens filmés ou qu'elle avait contribué, d'une façon ou d'une autre, à une forme spécifique et originale de ces derniers, les juges du fond ont retenu qu'elle n'était jamais intervenue dans leur conception, n'avait jamais donné de directive et s'était limitée à répondre aux questions posées dans l'ordre décidé par l'intervieweuse sans contribuer à la rédaction, au choix ou à l'ordonnancement de ces questions.
La Cour de cassation rejette le pourvoi de la société dans un arrêt du 15 octobre 2025 (pourvoi n° 24-12.076).
Elle indique en effet qu'il se déduit des dispositions des articles L. 111-1, L. 112-1 et L. 113-2 du code de la propriété intellectuelle, qu'un entretien filmé constitue en tant que tel une création protégée par le droit d'auteur dès lors qu'il revêt une forme originale et que la personne interrogée lors d'un tel entretien peut se voir reconnaître la qualité de coauteur à la condition qu'il soit démontré qu'elle a contribué à l'originalité de celui-ci.
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