Benoît Renard, Avocat, Otero commente la réforme fiscale chilienne.
La réforme fiscale chilienne a suscité une certaine inquiétude auprès de la communauté locale dès lors qu´elle craignait de voir son imposition sensiblement augmentée. Force est de constater que cette réforme n´aura pratiquement aucun impact sur les non-résidents au Chili (I) et des conséquences limitées sur l´imposition sur le revenu des résidents fiscaux chiliens (II).
1- L´absence d´impact de la réforme fiscale sur les non-résidents chiliens :
Le droit fiscal chilien prévoit que les dividendes de source chilienne perçu par un non-résident fiscal sont assujettis à l´Impôt Additionnel dont le taux est de 35%. Bien que ce taux puisse, à première vue, sembler élevé, il faut le relativiser dès lors qu´un crédit d´impôt correspondant à la proportion du montant de l´Impôt sur les Sociétés (« I.S », ci-après) préalablement payé par la Société se déduit de cet impôt additionnel.
Autrement dit, si un résident fiscal français, actionnaire d´une société de droit chilien perçoit des dividendes d´un montant de 100 euros, l´imposition applicable au Chili sera d´un montant de 35 euros (équivalent au 35% d´impôt additionnel) desquels se déduiront 22.5 euros (montant payé au titre de l´I.S). Par conséquent, le Trésor Public Chilien ne prélèvera « que » 12.5 euros sur le montant total des dividendes.
De plus, il convient de noter que le taux de l´IS augmentera à 24% en 2016 et à 25 ou 27% à partir de 2017.
Par conséquent, à supposer que le taux applicable à l´IS soit de 27%, si l´actionnaire de la société de droit chilien souhaite rapatrier ses 100 euros de dividendes de source chilienne, le trésor public chilien ne prélèvera « que » 8 euros correspondant aux 35 euros desquels se déduisent les 27 euros payés au titre de l´I.S.
La réforme fiscale n´affecte donc pas le non-résident fiscal souhaitant rapatrier des dividendes de source chilienne dès lors que la somme prélevée au titre de l´impôt additionnel diminuera automatiquement grâce à l´augmentation du taux de l´IS.
En effet, alors que les dividendes de source chilienne sont, en 2015, prélevées à un taux de 12.5%, ce taux diminuera à 8% en 2017 (à supposer que le taux d´I.S soit de 27%). Il convient, par ailleurs, de remarquer que la limitation, prévue par la Convention Franco-Chilienne, à 15% du montant brut des dividendes de source chilienne est, désormais dépourvu d´effet utile1.
2- Les conséquences limitées de la réforme fiscale sur l´I.R du résident fiscal chilien :
Contrairement au droit français, le droit fiscal chilien ne prend pas compte le fait qu´un résident soit marié ou ait des enfants.
En effet, l´I.R fait l´objet d´une déclaration individuelle et séparée pour chaque membre de la famille.
Un résident fiscal au Chili, célibataire, sans enfant, sera donc soumis à la même tranche d´imposition qu´un autre résident fiscal, marié ayant cinq enfants (à supposer qu´ils déclarent tous deux le même montant de revenus).
Un expatrié, résident fiscal au Chili, marié, cinq enfants, travaillant pour une société étrangère, et actionnaire d´une société de droit chilien, devra donc au moment d´établir sa déclaration d´I.R, déclarer tant les salaires, que les dividendes perçus. Par conséquent, si, en 2015, il déclare des revenus supérieurs à 90.000 euros, la tranche d´imposition qui lui sera applicable sera la plus élevée, c´est à dire 40%2, peu important le fait qu´il puisse avoir, ou pas, cinq enfants à charge.
Il convient de préciser, par ailleurs, qu´à compter de 2016, la réforme fiscale a rabaissé le taux de la tranche maximale d´imposition à 35%, ce qui signifie que ce résident fiscal bénéficiera d´une réduction significative de son imposition à l´I.R.
Par conséquent, la réforme fiscale favorise le contribuable déclarant un certain niveau de revenus annuels (+ de 90.000 euros) en rabaissant leurs taux d´I.R.
Enfin, il convient d´ajouter, qu´à défaut de contempler les notions que nous connaissons en France de "parts fiscales" dans le calcul de l´IR, les contribuables chiliens ont souvent recours à la création d'une Société Familiale d´Investissements ce qui leur permet de recréer, fictivement, un foyer fiscal "à la française" et de diminuer, in fine, le montant d´imposition total des revenus du foyer fiscal en y intégrant comme actionnaire/associé tous les membres de la famille.
Benoît Renard, Avocat, Otero
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NOTES
1. Article 10 de la Convention Franco-Chilienne permettant d´éviter la double-imposition dispose "Les dividendes sont aussi imposables dans l'Etat contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet Etat. Toutefois, si leur bénéficiaire effectif est un résident de l'autre Etat contractant, l'impôt ainsi établi ne peut excéder 15 % du montant brut des dividendes"
2. Voir les tranches d´imposition applicables en fonction des revenus déclarés en 2015 http://www.sii.cl/pagina/valores/global/igc2012.htm