Si des propos imputant une infraction à une personne contre laquelle une plainte a été classée sans suite ne peuvent plus être attaqués sur le fondement du droit au respect de la présomption d'innocence, ils sont néanmoins susceptibles de caractériser une diffamation.
Un homme, metteur en scène et directeur de théâtre, a été placé en garde à vue à la suite d'une plainte pour des faits de viol qui auraient été commis sept ans auparavant. Cette plainte a fait l'objet d'un classement sans suite au motif que l'infraction était insuffisamment caractérisée.
Quelques mois plus tard, un critique de théâtre a mis en ligne sur son blog ainsi que sur son compte Facebook, un article intitulé "#Metoo, le théâtre français aussi", dans lequel il évoquait des agressions sexuelles de la part notamment du metteur en scène sur plusieurs femmes et mettait en exergue, notamment, la plainte classée sans suite déposée contre ce dernier.
Estimant que cet article avait porté atteinte à sa présomption d'innocence, le dramaturge a assigné le directeur de publication et l'éditeur du blog sur le fondement des articles 809 du code de procédure civile, 9 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, 6, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, 9-1 du code civil, 6-I-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) et de l'article préliminaire du code de procédure pénale, afin d'obtenir la suppression de l'article en cause, la publication d'un communiqué sur le blog et le compte Facebook et la condamnation solidaire de l'auteur de l'article et de l'éditeur à lui payer une indemnité provisionnelle à valoir sur la réparation de son préjudice.
Après avoir constaté que, lors de la parution de l'article litigieux, le metteur en scène ne faisait l'objet d'aucune poursuite pénale, dès lors que la plainte déposée à son encontre avait été classée sans suite, la cour d'appel de Paris a écarté l'application des dispositions protégeant la présomption d'innocence et déduit qu'il n'y avait pas lieu à référé.
La Cour de cassation approuve les juges du fond dans un arrêt du 16 février 2022 (pourvoi n° 21-10.211).
Elle rappelle en effet que le droit au respect de la présomption d'innocence est celui de ne pas être présenté publiquement comme (...)