L’absence d’une remise précaire ne peut pas se déduire d’un jugement du tribunal de commerce, même définitif, qui ne s’impose pas à un juge pénal et qui ne constitue qu’un élément de discussion des parties.
Un pilote de ligne a été chargé par une compagnie aérienne de créer une structure commerciale dédiée à la formation de ses pilotes.
Il s’est trouvé que la société en question était en situation de faillite non déclarée en raison d’un traité d’apport d’actifs.
Le pilote, qui s’est porté partie civile, a qualifié ce traité de faux et a incriminé deux personnes pour les chefs de tromperie, escroquerie, faux et usages de faux en raison des pertes financières qu’il a subies.
Le juge d’instruction a prononcé un non-lieu.
La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a confirmé la décision du juge, notamment en ce qui concerne le chef d’abus de confiance.
Elle a relevé que la partie civile avait fait valoir l’existence d’un accord de volonté entre l’établissement chargé de développer la formation et la compagnie aérienne. Cet accord mentionnait que l’établissement devait former le personnel naviguant et que cela nécessitait une contrepartie, qui n’a pas été remplie en raison du licenciement du requérant.
Néanmoins, les juges du fond, pour rendre leur décision, se sont basés sur un jugement définitif du tribunal de commerce qui affirme qu’aucun contrat n’a été signé et qu’aucun accord sur des prestations réciproques n’a été établi. Ils ont ajouté qu’il ne pouvait donc pas être constaté qu’une remise précaire suivie d’une contrepartie aient eu lieu.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 16 mars 2022 (pourvoi n° 21-82.624), casse et annule l’arrêt d’appel au visa de l’article 593 du code de procédure pénale.
La Haute juridiction judiciaire rappelle que l’autorité de la chose jugée d’une décision, même définitive, d’un tribunal de commerce, ne s’impose pas à une juridiction répressive et ne constitue qu’un élément soumis à la discussion des parties.
Ainsi, les juges du fonds ne pouvaient pas se fonder sur le jugement du tribunal précité pour déduire qu’il n’y a pas eu de remise précaire.