Interview de Beatriz Chatain, Responsable exécutif du Knowledge Management, CMS Bureau Francis Lefebvre et Grégory Benteux, Associé, CMS Bureau Francis Lefebvre à propos du partenariat avec Open Law Europa.
Pourquoi le cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre a décidé de rejoindre le programme Open Law Europa ?
GB: CMS Bureau Francis Lefebvre rejoint Open Law Europa car c’est un moyen de participer collectivement à la réflexion sur la manière dont la technologie fait évoluer les besoins de nos clients et comment nous pouvons y répondre en tant qu'avocats. La place de leader du cabinet lui donne quelques responsabilités quant au rôle moteur qu'il doit tenir dans ces évolutions et ces échanges. Le droit ouvert déplace les lignes du savoir et de la compétence : nos clients disposent de plus en plus d'information brute, la technologie devrait leur permettre d'y accéder plus facilement et de sélectionner les éléments qui leur sont applicables. Le rôle de l'avocat n'est donc plus seulement de diffuser du savoir mais d'offrir son savoir-faire et sa capacité à penser et mettre en œuvre les projets de ses clients. Par ailleurs, ce travail collectif implique une collaboration enrichissante avec des start-ups, d’autres confrères, des métiers autres que juridiques. Enfin, cela permet d’analyser nos problématiques quotidiennes sous des prismes différents. Ce programme est donc une opportunité de plus de nous réinventer.
BC : Disposer de nouveaux outils d'accès aux données juridiques publiques permettrait d’optimiser le service rendu aux avocats par nos équipes de knowledge management. Pouvoir, par exemple, consulter de multiples sources d’information françaises et européennes via un point d’entrée unique représenterait un gain de temps considérable. La perspective de voir naître d’autres projets au fil du temps est assez séduisante. En effet, imaginez pouvoir personnaliser très simplement votre veille jurisprudentielle selon vos besoins puis l’enrichir selon vos critères les plus exigeants ou composer votre propre sélection des sommaires du JO, jour après jour. Les différentes réunions de travail qui sont organisées dans le cadre d'Open Law sont également l’occasion de faire une veille technologique et de manière générale, du marché ce qui est très utile dans l’exercice de notre métier.
Quel regard portez-vous sur le droit ouvert ?
GB : Le droit ouvert est une source de richesse. La diffusion plus large et plus libre de l'information juridique crée des opportunités d'affaires pour nous et nos clients. C'est donc fondamentalement une bonne chose. Par ailleurs, nous n'oublions pas que nous sommes des avocats et donc des acteurs citoyens. L'idée que chacun puisse plus facilement accéder au droit est une perspective souhaitée et une exigence démocratique, que nous ne pouvons que supporter.
Pour autant, nous sommes vigilants à ce que le droit soit réellement accessible : dans de nombreux cas, il n'est pas suffisant, et il est même parfois dangereux, de se reposer sur une information brute, sans pouvoir bénéficier des explications et des conseils adéquats. Le droit ouvert pose donc de manière renouvelée deux questions fondamentales : le rôle de l'avocat comme médiateur du savoir juridique ; la clarté et la stabilité du droit.
BC: Le principe du droit ouvert est une opportunité. Là où le respect de la propriété intellectuelle n'est pas un obstacle, comme c’est le cas en matière de données publiques, l'utilisateur doit néanmoins s'affranchir d’un grand nombre de barrières. En effet, il est techniquement difficile de relier les sources entre elles pour qu’elles fassent partie d’un fonds réutilisable. Cela nous fait perdre énormément de temps ainsi qu’à nos clients internes, les avocats. Il convient aussi de parler de coûts, certaines données ne sont pas suffisamment exploitées à cause essentiellement de ce manque d’harmonisation. Nous avons tous des budgets importants investis sur des abonnements à des bases de données alors que l’information est publique mais inexploitable en l’état.
Que représente pour votre cabinet l'innovation ?
GB : Notre histoire est une succession d'innovations, c’est dans l'ADN de notre Cabinet. Nos cellules de doctrine et nos avocats participent à de très nombreuses associations de place et à des groupes de travail, ce qui fait de notre cabinet l'un des acteurs remarqués de l'évolution du droit et de la fiscalité. Pour nos clients, nous avons multiplié les initiatives : nous disposons de plusieurs sites internet dédiés (LawNow, Lexplicite, RegZone, …), que nous pouvons personnaliser pour chacun de nos clients. Les avocats du cabinet, assistés d'une cellule de travail dédiée, sont très présents sur les réseaux sociaux professionnels. Nous testons dans certains pays un site de rédaction en ligne de contrats. Mais l'innovation n'est pas seulement dans l'usage de la technologie. Nous participons également à l'innovation en travaillant sur les nouvelles pratiques de gestion de l'entreprise et de ses ressources humaines, ou en soutenant des start-ups et des associations de promotion de l'innovation.
BC : En effet, notre cabinet a toujours été innovant. Avant que l'on ne parle de knowledge management (KM), nos équipes de Doctrine travaillaient en bonne intelligence avec les avocats, analysant finement notre législation et notre jurisprudence. Au fil des années, nous avons renforcé et adapté les processus déjà en place. Nous avons créé une plateforme de partage de connaissances, nous avons aussi recruté de professionnels du droit dédiés au KM et des personnalités de renom ont rejoint les équipes de Doctrine. Le droit ouvert, à cet égard, constituera un nouvel outil à notre disposition pour rester performants.
Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier)
Suivre @adumourier