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Sep 27
Injure, diffamation ou incitation à la violence, à la haine ou à la discrimination raciale via WhatsApp : infractions privées (contraventions) ou publiques (délits) ?
MARICI Avocats vous donne des éléments de réponse sur cette question d’actualité.
WhatsApp se présente comme :
Comme toute correspondance privée, elle est protégée par le secret des correspondances, composante du droit au respect de la vie privée (articles 226-15 et 432-9 du Code pénal ; loi n°91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques ; article 9 du Code civil ; article 8 de la Convention Européenne des droits de l’Homme).
De même, comme toute correspondance privée, sa protection cède devant les impératifs judiciaires dans les cadres légaux prévus.
Notamment, au pénal, les services enquêteurs peuvent avoir l’occasion de prendre connaissance de contenus échangés sur WhatsApp au cours d’enquêtes ou informations judiciaires.
Les articles 100 et suivants du Code de procédure pénale prévoient le cadre des interceptions de correspondances émises par la voie des communications électroniques (droit commun).
A l’occasion d’investigations permettant la prise de connaissance de correspondances privées, les services enquêteurs peuvent constater l’existence de faits susceptibles de constituer d’autres infractions, telles des diffamations, injures et/ou incitations à la haine, à la violence ou à la discrimination raciale.
La question se pose ici du caractère privé ou public de ces échanges, compte tenu des particularités et des possibilités offertes par les moyens de communications électroniques, au regard notamment du nombre de membres et des possibilités de partage.
S’agissant de la messagerie privée et cryptée WhatsApp : avant 2016, un groupe WhatsApp pouvait compter jusqu’à 100 membres. Depuis, ce nombre a été porté à 256 membres. Par ailleurs, chaque membre peut repartager les éléments reçus dans un groupe en les transférant vers d’autres groupes dont il est également membre.
Dernièrement, des articles de presse se sont fait l’écho de poursuites engagées à l’encontre de personnes auteurs de messages WhatsApp (en l’occurrence des membres des forces de l’ordre, notamment policiers) pour diffamation, injure ou incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination raciale, laissant transparaitre un doute sur le caractère privé ou public de ces échanges.
La répression est cependant bien différente dans les deux cas : infraction contraventionnelle dans le premier cas, délictuelle dans le second.
La diffamation est une allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur et à la considération d’une personne.
La diffamation peut être raciste, sexiste, homophobe, …
Elle relève d’une procédure spécifique permettant de protéger la liberté d’expression.
Il y a diffamation même si l’allégation est faite sous forme déguisée ou dubitative, ou si elle est insinuée. Peu importe que le fait en question soit vrai ou faux, mais il doit être suffisamment précis pour faire l’objet, sans difficultés, d’une vérification et d’un débat contradictoire.
Sanctions pénales principales :
DIFFAMATION PUBLIQUE : Délit
Cas général : 12 000 € d’amende maximum.
Racisme, sexisme, homophobie, handiphobie : 1 an d’emprisonnement / 45 000 € d’amende maximum.
Contre un élu, policier, magistrat, agent public,… : 45 000 € d’amende maximum.
DIFFAMATION NON PUBLIQUE : Contravention
Cas général : 38 € d’amende
Racisme, sexisme, homophobie, handiphobie : 1 500 € d’amende
Contre un élu, policier, magistrat, agent public,… : 38 € d’amende
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32079
Une injure est une parole, un écrit, une expression quelconque de la pensée adressés à une personne dans l’intention de la blesser ou de l’offenser.
L’injure peut être raciste, sexiste, homophobe, …
Sanctions pénales principales
INJURE PUBLIQUE : Délit
Cas général : 12 000 € d’amende maximum.
Racisme, sexisme, homophobie, handiphobie : 1 an d’emprisonnement / 45 000 € d’amende maximum.
INJURE NON PUBLIQUE : Contravention
Cas général : 38 € d’amende maximum.
Racisme, sexisme, homophobie, handiphobie : 1 500 € d’amende maximum.
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32077
L’auteur cherche non seulement à convaincre les témoins de ses propos, mais aussi à les pousser à agir. Les propos doivent avoir été prononcés dans des termes et dans un contexte qui impliquent la volonté de leur auteur de convaincre d’autres personnes.
Les personnes visées peuvent être un groupe de personnes non dénommées ou une ou plusieurs personnes précisées et désignées par leur nom.
A la différence de la diffamation raciste, l’incitation à la haine raciale concerne des propos haineux ou violents sans accusation précise.
Sanctions pénales principales
INCITATION… PUBLIQUE : Délit
1 an d’emprisonnement / 45 000 € d’amende maximum.
INCITATION… NON PUBLIQUE : Contravention
1 500 € d’amende maximum.
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32575
NB : Ces trois infractions peuvent se retrouver successivement dans les propos de l’auteur et pourront dans ce cas être réprimées séparément.
Si des propos susceptibles de constituer une diffamation, une injure ou une incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination raciale apparaissent dans une discussion WhatsApp, la question se pose de savoir si cette discussion présente un caractère privé ou public.
Le caractère privé devrait de prime abord être retenu : il s’agit d’une discussion dont l’accès est limité aux seuls membres du groupe concerné, personne d’autre ne pouvant y accéder ; les membres ont en principe un lien entre eux justifiant qu’ils fassent partie de ce groupe (lien d’amitié, familial, de travail, d’intérêts divers, …). En outre, dans les faits, ces groupes comptent généralement un nombre de membres relativement limité (ex : une quarantaine d’étudiants d’une même formation).
Le caractère public pourrait cependant être retenu dans des circonstances particulières, notamment au regard du nombre important de membres (jusqu’à 256 membres à date), des fluctuations dans ces membres (certains sortant et d’autres entrant régulièrement), du fait qu’ils ne se connaitraient pas tous ou ne seraient pas susceptibles de pouvoir se connaitre.
L’intérêt commun entre les membres du groupe pourrait ne pas paraitre suffisant pour exclure le caractère public, si celui-ci est par exemple trop général.
Plus globalement, se pose la question de la pertinence de la distinction privé / public pour ce type d’infractions commises au moyen d’un moyen de communication électronique tel que WhatsApp (bien distinct des réseaux sociaux comme Facebook).
En outre, se pose la question de l’efficacité de cette distinction privé / public par rapport aux objectifs poursuivis, lorsque les auteurs des propos litigieux sont des membres des forces de l’ordre (policiers, gendarmes), lesquels sont tenus de respecter des règles déontologiques s’appliquant en toutes circonstances et dont le non-respect peut faire l’objet de sanctions disciplinaires.
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Utilisation de WhatsApp et diffamation, injure, incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination