Lorsqu’une autorité pénale constate que les comportements du gouverneur d’une banque centrale d’un Etat membre sur lesquels elle enquête n’ont manifestement pas été accomplis par celui-ci en sa qualité officielle, la procédure à son égard peut être poursuivie dès lors que l’immunité de juridiction ne s’applique pas. Ne sont ainsi pas accomplis par un tel gouverneur en qualité officielle des actes de fraude, de corruption ou de blanchiment d’argent.
En l’espèce, le ministère public letton a inculpé le gouverneur de la banque centrale de Lettonie de différents délits de corruption – acceptation de pots de vin et blanchiment d’argent. En tant que gouverneur de banque centrale d’un Etat membre de l’Union européenne (UE) et membre du conseil général et du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne, il estime pouvoir jouir de l’immunité juridictionnelle prévue par l’article 11, sous a) du protocole n°7 sur les privilèges et immunités de l’UE – accordant aux fonctionnaires et autres agents de l’Union une immunité de juridiction pour tous les actes accomplis par eux en leur qualité officielle.
Dans le but de savoir si ledit protocole était applicable au cas d’espèce, le juge du tribunal de Riga a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’une question préjudicielle.
Pour déterminer le l’applicabilité du protocole n° 7 de l’UE au cas d’espèce, et, partant, de l’immunité juridictionnelle prévue en son article 11, la CJUE a, par un arrêt du 30 novembre 2021 (affaire C-3/20), précisé son champ d’application.
D’abord, les juges luxembourgeois ont précisé que "le protocole sur les privilèges et immunités, conformément à son article 22, s’applique à la BCE, aux membres de ses organes et à son personnel. Par conséquent, ce protocole est applicable aux gouverneurs des banques centrales des États membres, en tant que membres d’au moins un organe de la BCE". Ces derniers peuvent donc, a fortiori, bénéficier de l’immunité de juridiction prévue à l’article 11 "pour les actes accomplis en leur qualité officielle de membre d’un organe de la BCE". Cette immunité perdure après la cessation de leurs fonctions.
Concernant l’objet et l’étendue de la protection garantie par l’article 11, sous a) du protocole, la Cour précise que l’article 17 dudit (...)