Les Etats membres peuvent-ils imposer l’obligation de conserver les données relatives au trafic des communications électroniques de manière généralisée et indifférenciée, en particulier dans le cadre d’enquêtes sur des opérations d’initiés ou des manipulations et abus de marché ?
La Cour de cassation a été saisie du pourvoi de deux personnes accusées de délit d’initié et de blanchiment à la suite d’une enquête de l’Autorité des marchés financiers (AMF), dans le cadre de laquelle des données personnelles relatives à l’utilisation de lignes téléphoniques, collectées en application du code monétaire et financier, avaient été utilisées.
Dans le cadre de ces litiges, la Cour de cassation a introduit deux questions préjudicielles auprès de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) portant sur la possibilité pour les Etats membres d'imposer l’obligation de conserver les données relatives au trafic des communications électroniques de manière généralisée et indifférenciée.
Dans ses conclusions rendues le 18 novembre 2021 (affaires jointes C-339/20 et C-397/20), l'avocat général près la CJUE considère que, bien que la directive 2003/6/CE du 28 janvier 2003 et le règlement (UE) n° 596/2014 du 16 avril 2014 relatifs aux abus de marché doivent être pris en considération dans ces affaires, la jurisprudence de la Cour récapitulée dans l’arrêt du 6 octobre 2020 (affaires jointes C-511/18, C-512/18 et C-520/18) est applicable dans ce contexte.
Il précise que les dispositions relatives au traitement des enregistrements de données relatives au trafic contenues dans la directive et le règlement précités doivent être interprétées dans le cadre du régime établi par la directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002 (directive vie privée et communications électroniques) qui constitue la norme de référence en la matière.
L’avocat général souligne que ni la directive ni le règlement relatifs aux abus de marché n’accordent d’autorisations spécifiques et autonomes pour conserver des données, mais qu’ils autorisent simplement les administrations compétentes à accéder aux données conservées dans des enregistrements existants, qui doivent avoir été établis conformément à la directive vie privée et communications électroniques.
Il conclut qu'est contraire au droit de l'Union une (...)