1. Le marché du vidéo streaming aujourd’hui: au-delà de la distribution et dans la création de contenu
- Video streaming: l’aspect technique
La technologie de vidéo streaming a beaucoup évoluée: le groupe le plus influent, bien sûr, est constitué par les fournisseurs de technologie de streaming eux-mêmes, qui choisissent quels technologies et services doivent être integrés dans leurs plateformes. Cela comprend Apple, qui fournit Quicktime, ainsi que la technologie basée sur HTML5 pour atteindre les appareils iOS; Adobe avec Flash; et Microsoft avec Windows Media et Silverlight. Dans les premiers jours du streaming, les plateformes d’écoute les plus adaptées étaient les ordinateurs Windows et Macintosh.
Alors que Apple et Microsoft ont toujours un poid important, les plateformes d’écoute ont tendance à être plus ouvertes que les appareils portables, alors que ces derniers comprennent le segment à plus haut potentiel de hausse des utilisateurs de médias de streaming. Parce qu’Apple détient tant une plateforme trés populaire (iDevices) qu’un système d’exploitation (iOS), il retient un pouvoir absolu pour contrôler les standards adoptés par les appareils Apple. Les autres influenceurs de portables tendent à être divisés entre les vendeurs de hardware – tels que LG, Samsung, Motorola, Nokia et HTC – et les fournisseurs de système d’exploitation portables tels que Google (Android) et Microsoft (Windows Phone). Les fournisseurs de livraison de médias de streaming tels que les plateformes de vidéo en ligne (“OVPs”) (qui sont des services productivisés qui permettent aux utilisateurs de télécharger, convertir, enregistrer et jouer le contenu vidéo sur internet, souvent via une solution structurée, évolutive qui peut être monétisée) et tels que les sites de contenus générés par les utilisateurs (“sites UGC”), influencent aussi l’adoption de la technologie du streaming. Par exemple, alors que Microsoft a introduit Silverlight en 2007, ce-dernier n’a pas été soutenu par un OVP avant 2010, mettant une halte à son adoption.
Au contraire, les OVPs tels que Brightcove et Kaltura, et les sites UGC tels que YouTube et Vimeo ont été parmi les premiers à soutenir l’iPad et HTML5, accélérant leur adoption. Alors qu’il y a des douzaines de fournisseurs dans les deux marchés, les OVPs clés incluent Brightcove, Kaltura, Ooyala, Sorenson Media, Powerstream et ClickstreamTV, alors que les sites UGC les plus notables sont YouTube, Vimeo, DailyMotion, Viddler et Metacafe. Du côté de la vidéo live-streaming aussi, la technologie a fait des avancées significatives. Les OVPs spécialisés tels que Ustream et Livestream offrent la diffusion instantanée de vidéos live générées par les utilisateurs avec une fenètre live chat située prêt du vidéo player, donnant ainsi aux utilisateurs la possibilité de non seulement visionner des évènements en train de se dérouler en temps réel mais aussi de commenter sur ces évènements[2]. YouTube a aussi créé un service de video streaming live à la portée de ses utilisateurs.
Et maintenant, la cerise sur le gâteau: les distributeurs et les fournisseurs de vidéo streaming. La description de cet écosystème entier du video streaming ne saurait, en effet, être complète sans mentionner les fournisseurs de médias internet à la demande – aussi intitulés services de video streaming à la demande (“services SVoD”). A partir de 2011, la presse a commencé à blogger à propos des services de médias en streaming les plus populaires qui apporteraient du contenu commercial de haute qualité visionné en streaming sur les écrans TV, les smartphones et les ordinateurs computers du public[3]. Netflix, Amazon Video on Demand (maintenant renommé Amazon Instant Video et Amazon Prime), Hulu Plus et Vudu sont les numéros un (“fournisseurs SVoD”).
- Dupliquer le modèle business à succés de la musique en streaming dans la sphère de la vidéo en streaming: Tout est dans la grande échelle
Les fournisseurs SVoD ont beaucoup de chance: non seulement ils peuvent bénéficier des avancées importantes faites par la technologie des médias en streaming depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, mais en plus ils peuvent aussi s’éduquer eux-même plus rapidement grâce à, et éviter les écueils qui menaçaient, leurs prédécesseurs, c.a.d les fournisseurs de musique en streaming à la demande tels que Spotify, Deezer, Pandora, Rdio, Grooveshark et Beats (les “fournisseurs SMoD”).
Alors que les fournisseurs SMoD facturent en général USD4,99 par mois pour un plan d’accés à leurs services, et jusqu’à USD9,99 par mois pour un plan premium, les fournisseurs SVoD commencent leurs plans de souscription mensuels à USD7,99 avec un prix maximum de USD11,99 par mois pour les services SVoD allant jusqu’à 4 écrans par foyer. Netflix, qui n’a pas froid aux yeux, a reçu beaucoup de critique suite à l’augmentation de ses forfaits de nouveau souscripteur – partout dans le monde – de USD1 à USD2 par mois[4]. Si nous faisons des calculs rapides, nous pouvons anticiper qu’il y a plus d’argent à gagner dans les services de SVoD, par rapport aux services de SMoD, à condition que ces services soient développés à grande échelle. Et ils sont développés à grande échelle: le 23 avril 2014, Amazon a annoncé le lancement d’un accord de license qui donnent aux adhérents d’Amazon Prime l’accés exclusif à la librairie trés prisée de HBO de contenu original, augmentant ainsi sans aucun doute l’attraction de devenir un souscripteur à Amazon Prime.
Le 24 avril 2014, son concurrent Netflix a annoncé qu’il avait pris un engagement avec trois sociétés de cable de petite taille afin de fournir à ses membres accés à son contenu via TiVo DVRs, alors que le 28 avril 2014 il a été annoncé une transaction avec Verizon pour fournir aux adhérents de Netflix un accés en ligne à haut débit pour le contenu en streaming, ceci étant le deuxième deal de ce type que Netflix a passé avec un fournisseur d’accés internet (“ISP”). Etant donné que l’industrie des hautes technologies – et le secteur de l’entertainment dans une moindre mesure – fonctionne beaucoup sur le modèle économique du “winner take all” (le vainqueur rafle la mise), le contenu en streaming est un champs de guerre en évolution grouillant d’opportunités et de risques, dans lequel les entreprises assoient leur suprématie et accroissent leur part de marché. Il y a des vainqueurs incontestés, dans le secteur des services SVoD, tels que Netflix qui, durant le premier trimestre 2014, a obtenu 2,25 millions d’adhérents au streaming aux Etats-Unis et un total de 4 millions dans le monde. Il a maintenant 35,7 millions d’adhérents américains et plus de 48 millions globalement, en ligne avec l’objectif à long-terme de 60 à 90 millions d’adhérents sur son marché domestique. Cela a d’ailleurs en outre beaucoup de sens du point de vue du consommateur: le streaming permet de convertir les consommateurs les plus appréciés faisant du téléchargement (de contenu musical et vidéo) en des souscripteurs et, par là-même, de réduire le montant de leurs dépenses mensuelles entre USD20 et USD30 à USD9,99 en moyenne.
A la fin de l’année 2014, les revenus de streaming musicaux représentaient USD3,3 milliards, une augmentation de 37% depuis 2013. En comparaison, les services combinés en ligne et TV de vidéo en streaming représentaient un revenu de USD7,34 milliards en 2013, un chiffre que PriceWaterhouseCoopers (“PwC”) voit augmenter à USD11,47 milliards en 2016, avant d’atteindre USD17,03 milliards en 2018. Cette augmentation sera surtout tirée par la souscription à des services de vidéo en streaming, tels que Netflix et Hulu, selon PwC, plutôt que par des abonnements souscrits par le biais de la TV.
- Le saut dans la création de contenu et la production
Il est intéressant de noter que les fournisseurs SVoD vont au-délà de ce que les fournisseurs SMoD ont jamais fait: ils entrent dans la sphère de production du contenu, afin d’enrichir leurs catalogues et offres; pour étendre leurs réseaux de, et atteindre les, cadres et managers ayant beaucoup de pouvoir dans le milieu de l’entertainment, producteurs et movie-stars ainsi que pour asseoir leur nouveau statut et influence.
Les services en ligne de vidéo streaming tels que Netflix et Hulu génèreront un chiffre d’affaires annuel supérieur au box office des films grand-écran aux Etats-Unis dés 2017, selon un nouveau rapport publié par PwC. Le rapport prévoit que les services de streaming seront le plus gros contributeur à l’industrie américaine de l’entertainment filmé dans les quatre prochaines années, alors que les revenus générés par la TV et les abonnements des fournisseurs de vidéo à la demande arrivent à presque $14 milliards, $1,6 milliard de plus que le montant généré par le box office du cinéma traditionel. Ainsi, les fournisseurs SVoD ont, et continueront à avoir, beaucoup d’argent à disposition à investir. Comment investir ces revenus à disposition de meilleure façon qu’en produisant du contenu vidéo de haute-qualité, pour enrichir le catalogue et l’offre de produits? Le domaine majeur dans lequel les services de streaming auront un impact sur le box office traditionnel, selon le rapport de PwC, est les dates de sortie.
Pour l’instant, la plupart des films sont projetés pendant plusieurs mois dans les cinémas avant d’être lentement acheminés vers les services de streaming. PwC écrit que la force d’entreprises telles que Netflix va probablement faire pression sur l’industrie pour que cette transition se fasse plus rapidement, offrant de l’entertainment filmé aux consommateurs plus tôt. De manière plus importante, les fournisseurs SVoD n’arrêtent pas d’étendre leurs répertoires de contenu. Netflix a déjà USD7,1 milliards d’obligations existantes pour du contenu original et sous license, et a récemment pris un engagement pour des séries originales en espagnol; des séries de Mitch Hurwitz (le créateur de la série adulée Arrested Development); une troisième saison de House of Cards et une saison finale de The Killing d’AMC. En effet, les profits économiques de House of Cards, qui a créé un précédent dans le secteur de la vidéo en streaming, ont été aussi élevés que les revues et critiques cinématographiques. La nouvelle stratégie de Netflix a fortifié son modèle de revenu existant — acquérant et conservant ses adhérents — et ouvrant en outre de nouveaux flots de revenus tels que les licences de contenu ou même un chaine de TV avec les distributeurs traditionnels. Netflix a dépensé à peu prés USD100 millions pour produire la première saison de House of Cards plus des investissements de marketing supplémentaires, y compris des achats d’espaces publicitaires pour les spots TV primetime et des panneaux d’affichages à haut-profil. Si House of Cards a rapporté un demi-million de nouveaux adhérents Netflix, avec la même durée de vie en moyenne que les souscripteurs actuels (25 mois en moyenne), cette série aura atteint son seuil de rentabilité en tout juste deux ans.
Le vrai test était la valeur de la durée de vie de ces nouveaux souscripteurs. Que ce serait-il passé si beaucoup ou la majorité d’entre eux s’avéraient être des spectateurs opportunistiques qui décidaient d’annuler leurs adhésions quelques mois aprés avoir visionné House of Cards? Alors l’opportunité d’arriver au seuil de rentabilité semblait bien largement différente. Par exemple, si la durée de vie du consommateur moyen était plus proche de quatre mois, alors Netflix aurait eu besoin de plus de trois millions de nouveaux adhérents pour que le projet atteigne son seuil de rentabilité — en pratique, une augmentation de 43 pour cent au dessus de son taux actuel moyen d’acquisition.
Bien évidemment, le débat est maintenant clos et, en plus de ses multiples séries, le brillant Netflix a conclu de nombreux deals cinématographiques récents – il planifie de sortir la suite du film d’Ang Lee Crouching Tiger, Hidden Dragon le même jour en ligne et dans les cinémas Inmax, et a obtenu un accord exclusif pour quatre films avec Adam Sandler – transactions qui ont beaucoup agacé le milieu du cinéma. Lors d’une présentation durant le MIPCOM à Cannes en novembre 2014, le directeur en chef du contenu de Netflix Ted Sarandos a insisté que la société tentait seulement de moderniser un modèle de distribution qui “est largement obsolète pour le public de vidéo à la demande que Netflix souhaite servir”. Netflix, a-t-il dit, n’est pas en train de tenter d’anéantir le grand écran mais plutôt de “restaurer les choix et options” pour les spectateurs en changeant les sorties day-and-date. Non seulement cela, mais Sarandos a aussi dit que Netflix allait se développer dans des genres qui sont beaucoup plus de niche, y-compris le financement de documentaires et de films d’art et d’éssai. Ainsi, le coup de marketing en faisant équipe avec la mega movie star Leonardo di Caprio sur la sortie du documentaire Virunga qui cible la lutte contre la contrebande de gorilles en voie de disparition dans la République Démocratique du Congo. Le documentaire a été diffusé simultanément sur Netflix et dans les salles à New York et Los Angeles le 7 novembre 2014. Le score d’Amazon Prime dans la création et la production de contenu est aussi impressionante, surtout grâce à sa décision, en janvier 2015, d’embaucher Woody Allen pour écrire et mettre en scène une série pour ses services SVoD. En outre, la force compétitive d’Amazon Prime a été reconnue dans la TV en gagnant deux trophées Golden Globe pour meilleure comédie, pour sa série trés appréciée Transparent, et pour meilleur acteur de série, pour la star Jeffrey Tambor, aussi en janvier 2015. Ainsi le futur est plus que brillant, pour les fournisseurs SVoD, mais quelles sont les menaces qui pourraient entraver leur suprématie et part de marché croissants ?