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Décompilation d’un logiciel : état des lieux - 5- L’utilisation des informations obtenues à des fins étrangères: contrefaçon

L’utilisation des informations obtenues à des fins étrangères: contrefaçon

Les informations obtenues par la décompilation d’un logiciel ne peuvent être utilisées ou communiquées autrement qu’à des fins d’interopérabilité, et non pour porter atteinte au droit d’auteur du logiciel d’origine.

Trois conditions encadrent l’utilisation et la communication des informations obtenues par la décompilation.

Toutes faisaient défaut en l’espèce. La Cour d’appel de Caen relève ainsi que la publication d’un article de blog afin de révéler les failles de sécurité de Skype et publier le code source des parties décompilées, constitue un acte de contrefaçon de droit d’auteur — peu importe que l’opération de décompilation en elle-même ait été licite.

Premièrement, l’utilisation et la communication des informations obtenues par décompilation à des fins de sécurité informatique ne rentrent pas dans l’application des conditions 1o et 2o précitées, lesquelles ne se justifient que par des fins d’interopérabilité.

L’arrêt de la Cour d’appel de Caen, de ce point de vue, se situe dans la lignée d’un autre arrêt de la Cour d’appel de Paris, relatif également à une décompilation à des fins de sécurité informatique (CA Paris, ch. 13 A, 21 février 2006, affaire G. c/ TEGAM).

Deuxièmement, la Cour relève les déclarations faites par le prévenu aux services de police qui, maladroitement, indiquent le développement d’un système «similaire à Skype».
Pourtant, aucun élément ne permet de relever si une telle similitude aurait été pertinente en matière de droit d’auteur.

En effet, on peut comprendre de ces déclarations qu’il s’agissait de développer un système concurrent de Skype, qui le remplace, et non forcément un système dont l’expression, le code lui-même, serait similaire et donc, contrefaisant.

C’est, là aussi, une question majeure d’interprétation de la directive 91/250.

Les informations d’interopérabilité peuvent-elles être utilisées pour développer un logiciel interopérable concurrent, qui remplace le logiciel d’origine, ou seulement un logiciel interopérable fonctionnant avec le logiciel d’origine, sans le remplacer?

Divers amendements et propositions avaient, en effet, suggéré que seule la deuxième option pouvait satisfaire les conditions de légalité .

C’est cependant la première option qui a été retenue, le 13 décembre 1990, par le Conseil des ministres : il s’agit de permettre «l’interopérabilité d’un logiciel créé de façon indépendante avec d’autres logiciels» (L. 122-6-1, IV) et non pas forcément avec le logiciel d’origine qui fait l’objet de la décompilation.

A propos des auteurs

Pierre -Yves MARGNOUX, associé du cabinet Derriennic Associés, est un spécialiste reconnu en droit de l’informatique et des nouvelles technologies. Son expertise couvre aussi bien le contentieux des nouvelles technologies, du droit d’auteur et de la concurrence déloyale, que le conseil et les négociations contractuelles dans le cadre de contrats complexes.

Hugo ROY est élève-avocat, diplômé de Sciences Po. Spécialiste du droit des logiciels et du droit des communications électroniques, il est membre de la fondation européenne du logiciel libre (FSFE) et fondateur du projet « Terms of Service; Didn't Read » (tosdr.org).

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