Lorsqu'une construction a été édifiée conformément à un permis de construire, le propriétaire ne peut être condamné par un tribunal de l'ordre judiciaire à la démolir du fait de la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des servitudes d'utilité publique que si, préalablement, le permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative.
Par arrêté du 8 avril 2005, le préfet du Morbihan a délivré à la société Z. un permis de construire quatre éoliennes et un poste de livraison sur une parcelle située sur le territoire de la commune de Guern. Ce permis a été transféré à la société Y. Après la mise en service de trois éoliennes, le Conseil d’Etat a confirmé l’annulation par la juridiction administrative d’appel de l'arrêté préfectoral du 8 avril 2005. M. X. et d’autres riverains ont assigné la société Y., sur le fondement des articles L. 480-13 du code de l'urbanisme et 1382, devenu 1240 du code civil, pour voir ordonner le démontage des éoliennes et du poste de livraison et obtenir le paiement de dommages-intérêts. Celle-ci a soulevé l'incompétence de la juridiction judiciaire pour connaître de la demande tendant à la démolition desdites installations.
Dans un arrêt du 15 décembre 2016, la cour d'appel de Rennes a fait droit à la demande de la société Y. Pour accueillir cette exception et décliner la compétence judiciaire, elle retient que, même si la juridiction administrative, en annulant le permis de construire, a sanctionné le non-respect des prescriptions en matière d'urbanisme, le juge judiciaire ne peut ordonner la démolition des éoliennes litigieuses, dès lors qu'une telle mesure aurait pour effet de remettre en cause la poursuite de l'activité de ces installations, qui relèvent, pour leur exploitation, de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement.
Par un arrêt du 14 février 2018, la Cour de cassation a invalidé le raisonnement de la cour d’appel de Rennes. Elle rappelle que le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires s'oppose seulement à ce que le juge judiciaire substitue sa propre appréciation à celle que l'autorité administrative a portée, dans l'exercice de ses pouvoirs de police spéciale, (...)