Lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, la faculté d'émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge administratif d'une demande tendant à son recouvrement, notamment dans le cadre d'un référé-provision.
Le département de l'Eure a conclu deux marchés et a, par la suite, demandé la condamnation des sociétés contractantes au paiement d'une provision au motif que l'Autorité de la concurrence les avait condamnées pour manœuvres dolosives.
Un expert a évalué à 900.453,68 € le surcoût entre les prix payés par le département dans le cadre de l'exécution des deux marchés et les prix qui auraient dû être payés s'ils avaient été déterminés par le libre jeu de la concurrence.
Le 27 novembre 2015, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Douai a jugé irrecevable la demande de provision présentée par le département.
Il a estimé que l'action introduite par celui-ci n'était pas fondée sur la responsabilité contractuelle des sociétés mais sur leur responsabilité quasi-délictuelle tenant aux manoeuvres dolosives relevées à leur encontre et sanctionnées par l'Autorité de la concurrence.
Le 24 février 2016, le Conseil d’Etat annule la décision du juge des référés de la cour administrative d'appel de Douai.
Il rappelle qu'en principe, selon sa jurisprudence du Préfet de l'Eure, "une collectivité publique est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle a le pouvoir de prendre".
Il précise qu’ "en particulier, les collectivités territoriales, qui peuvent émettre des titres exécutoires à l'encontre de leurs débiteurs, ne peuvent saisir directement le juge administratif d'une demande tendant au recouvrement de leur créance".
Toutefois, il estime que "lorsque la créance trouve son origine dans un contrat, la faculté d'émettre un titre exécutoire dont dispose une personne publique ne fait pas obstacle à ce que celle-ci saisisse le juge administratif d'une demande tendant à son recouvrement, notamment dans le cadre d'un référé-provision engagé sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative".
En l’espèce, "l'action tendant à (...)