Un bien en possession d'une personne privée et qui avait déjà été intégré au domaine public mobilier à une date antérieure doit être restitué à l'Etat.
L'Etat a présenté une action en revendication relative à une pierre sculptée de 1,63 mètre, désignée comme le "fragment à l'Aigle", provenant du jubé gothique de la cathédrale de Chartres et acquise en 2002 par la société B.
Le 18 janvier 2018, la cour d'appel de Paris a ordonné à la société de restituer à l'Etat le fragment du jubé de la cathédrale de Chartres dit le "fragment à l'Aigle" dans les trois mois de la signification du jugement et a rejeté sa demande en indemnisation pour procédure abusive.
Elle a comparé le fragment à l'Aigle et une autre sculpture composant, ensemble, un bas-relief du jubé de la cathédrale de Chartres, démonté en 1763 et a retenu que ce fragment correspond à celui extrait en 1848 du sol de la cathédrale par l'architecte Lassus, à une époque où le bâtiment relevait du domaine public de l'Etat.
Elle en a déduit que le fragment à l'Aigle avait intégré à cette date le domaine public mobilier.
Le 13 février 2019, la Cour de cassation valide le raisonnement des juges du fond et rejette le pourvoi de la société.
Tout d'abord, elle rappelle que la protection du domaine public mobilier impose qu'il soit dérogé à l'article 2279, devenu 2276 du code civil.
Ensuite, elle précise que l'action en revendication d'un tel bien relève de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle s'exerce à l'égard d'une personne qui, ayant acquis ce bien de bonne foi, pouvait nourrir une espérance légitime de le conserver ou d'obtenir une contrepartie.
Cependant, elle souligne que l'ingérence que constituent l'inaliénabilité du bien et l'imprescriptibilité de l'action en revendication est prévue à l'article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-460 du 21 avril 2006 relative à la partie législative du même code.
Il s'en déduit qu'aucun droit de propriété sur un bien appartenant au domaine public ne peut être valablement constitué au profit de (...)