A l'occasion d'un litige opposant la société S., fournisseur d'accès à internet à une société de gestion belge chargée d'autoriser l'utilisation, par des tiers, des oeuvres musicales des auteurs, des compositeurs et des éditeurs, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que de droit de l'Union s'opposait à une injonction, prise par une juridiction nationale, d'imposer à un fournisseur d'accès à Internet la mise en place d'un système de filtrage afin de prévenir les téléchargements illégaux de fichiers.
En l'espèce, la société de gestion belge a constaté, en 2004, que des internautes utilisant les services du fournisseur d'accès à Internet téléchargeaient sur Internet, sans autorisation et sans paiement de droits, des oeuvres reprises dans son catalogue au moyen de réseaux "peer-to-peer".
Le président du tribunal de première instance de Bruxelles avait ordonné au fournisseur d'accès de faire cesser ces atteintes au droit d'auteur en rendant impossible, au moyen d'un logiciel "peer-to-peer", toute forme d'envoi ou de réception par ses clients de fichiers électroniques reprenant une oeuvre musicale du répertoire de la société de gestion.
La cour d'appel de Bruxelles avait par la suite demandé à la CJUE si le droit de l'Union permet aux États membres d'autoriser un juge national à ordonner à un fournisseur d'accès à Internet de mettre en place, de façon générale, à titre préventif, aux frais exclusifs de ce dernier et sans limitation dans le temps, un système de filtrage des communications électroniques afin d'identifier les téléchargements illégaux de fichiers.
Dans un arrêt du 23 novembre 2011, la CJUE a retenu qu'en adoptant l'injonction obligeant le fournisseur d'accès à mettre en place un tel système de filtrage, le juge national ne respecterait pas l'exigence d'assurer un juste équilibre entre le droit de propriété intellectuelle, d'une part, et la liberté d'entreprise, le droit à la protection des données à caractère personnel et la (...)