La mise à exécution du décret d’extradition du frère de l'ancien président burkinabé, sans réexamen préalable de la validité et de la fiabilité des assurances diplomatiques fournies par le Burkina Faso après le coup d'Etat de 2022, est contraire à la Convention EDH.
L’affaire concerne l’extradition, autorisée par décret du 21 février 2020, de Paul François Compaoré vers le Burkina Faso, pays dans lequel il est visé par des poursuites pénales relatives à des faits "d’incitation à assassinats" d’un journaliste d’investigation et des trois hommes qui l’accompagnaient.
Paul François Compaoré est le frère de M. Blaise Compaoré et fut l’un de ses proches conseillers lorsque celui-ci exerça la fonction de président de la République du Burkina Faso entre 1991 et le 31 octobre 2014, date à laquelle il fut contraint de démissionner en raison d’un soulèvement populaire.
Le requérant soutient que son extradition vers le Burkina Faso l’exposerait à un risque réel de subir la torture ou des traitements contraires à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l'Homme.
Dans un arrêt Compaoré c/ France du 7 septembre 2023 (requête n° 37726/21), la Cour européenne des droits de l'Homme dit, à l’unanimité, qu’il y aurait violation de l’article 3 en son volet procédural de la Convention EDH en cas de mise à exécution du décret d’extradition sans réexamen préalable de la validité et de la fiabilité des assurances diplomatiques fournies par le Burkina Faso.
Après s’être penchée sur les assurances diplomatiques fournies par l’Etat du Burkina Faso qui a demandé l’extradition, et avoir examiné les critères de fiabilité de ces assurances à la lumière d’un contexte politique radicalement renouvelé à la suite de deux coups d’Etat militaires, la Cour constate que ces assurances n’ont pas été réitérées par le second gouvernement de transition mis en place par le nouveau chef d’Etat burkinabè ayant accédé au pouvoir le 30 septembre 2022, et que le gouvernement, qui a eu communication des dernières observations du requérant sur ce point, en date du 19 octobre 2022, n’a fait aucun commentaire.
La Cour considère en conséquence qu’à la date à laquelle elle statue, l’absence de prise en compte par les autorités internes du nouveau contexte politique et constitutionnel dans le (...)