Un élu n'est pas tenu aux mêmes exigences déontologiques qu'un journaliste en matière de diffamation.
A la suite de la publication, par un hebdomadaire, d'un reportage consacré à un groupe de combattants afghans présentés comme les auteurs d'une embuscade ayant coûté la vie à dix militaires français, M. B., député des Yvelines, a diffusé un communiqué demandant l'ouverture d'une enquête sur le financement de ce reportage, faisant état d'informations selon lesquelles le journal aurait versé une somme de 50.000 dollars aux "talibans", et concluant que si l'affaire était avérée, il contribuait à financer des actions de guerre contre les soldats français. Le lendemain, M. B., dans un entretien accordé à un journal, a déclaré : "il se dit dans la région que les journalistes de l'hebdomadaire auraient payé une somme de 50.000 dollars pour faire leur reportage ; sinon, ils auraient été pris en otage et les talibans auraient demandé une rançon". S'estimant diffamés par ces propos, le directeur de publication de l'hebdomadaire, les journalistes en cause, ainsi que la société éditrice, ont porté plainte, et M. B., renvoyé devant le tribunal correctionnel, a été condamné pour diffamation envers particulier.
La cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 11 avril 2012, a infirmé le jugement au motif qu'il était légitime qu'un député, membre de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, s'exprime sur un sujet relatif à l'engagement des troupes françaises en Afghanistan, et que M. B. a produit de nombreuses pièces justifiant de ses sources et de la réalité de la rumeur suscitant ses interrogations quant à la pratique d'une rémunération par les journalistes de leurs intermédiaires en zone de guerre. Les juges ont ajouté que le prévenu s'était exprimé avec prudence, sur un sujet d'actualité, en disposant d'une base factuelle suffisante pour évoquer l'éventualité d'un paiement. M. B. devait donc se voir accorder le bénéfice de la bonne foi.
La Cour de cassation approuve les juges du fond. Dans un arrêt du 11 juin 2013, elle retient que le prévenu, qui n'est pas un professionnel de l'information, n'était pas tenu aux mêmes exigences déontologiques qu'un journaliste, qu'il disposait d'une base factuelle suffisante pour s'interroger (...)