Affirmer que l’IA a vocation à devenir un outil du quotidien des salariés ne relève plus de la fiction. Pour les directions des Ressources Humaines comme pour l’ensemble des salariés, il est donc préférable d’être mis en condition de pouvoir surfer la vague pour en tirer profit plutôt que de la subir de plein fouet. Explications par Laure Hosni (Counsel), et Claire-Lisa Leclerc (Avocate senior en droit social), August Debouzy.
L’émergence des systèmes d’intelligence artificielle (IA) et en particulier de l’IA Générative dans la sphère professionnelle représente un défi majeur de transformation des entreprises à court, moyen et long terme. Plusieurs sujets structurants méritent ainsi d’être anticipés par les Ressources Humaines pour accompagner l’introduction de l’IA et pour ce faire, une méthodologie peut être proposée.
Point rassurant, le Code du travail prévoit déjà des dispositions pertinentes permettant de mettre en œuvre et d’encadrer ces mutations inéluctables.
L’enjeu central de la formation à l’IA
Une double analyse préalable s’impose : d’abord sur la nature de l'IA et sa conformité réglementaire, ensuite sur l’impact sur l'emploi, nécessitant à la fois une cartographie des métiers sensibilisés, une identification claire des interactions entre l’IA et les salariés et des nouvelles compétences attendues.
Les entreprises doivent être à même de proposer une formation des salariés à la hauteur de ces différents enjeux : la formation et l'adaptation des salariés à leur poste et aux nouvelles technologies, sont non seulement essentielles mais obligatoires.
Des tâches seront amenées à être supprimées et d’autres devront être ajustées. Les descriptifs de fonction évolueront de manière plus ou moins significative, sans pour autant que cela n’entraîne systématiquement - fort heureusement - des suppressions de poste.
L’entreprise devra ainsi adapter son organisation en procédant à des projections, sensibiliser ses salariés et les former aux évolutions de leur emploi et aux compétences et métiers clés de demain. Prévoir des phases de test peut être une bonne option pour mieux cerner les besoins en formation selon les retours d’expérience.
L’objectif est que l’IA soutienne les salariés dans l’exécution de leurs missions plutôt que de les remplacer purement et simplement. La gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP), précieux dispositif RH, qui s’inscrit dans une démarche prospective et proactive visant à accompagner les changements prévisibles, prend ici tout son sens dans ce contexte mouvant.
L’IA modifiera en profondeur le travail dans son contenu, son évaluation mais également dans son vécu par les salariés. Cette approche participe à la prévention des risques psychosociaux, l’essor de l’IA étant susceptible d’entraîner des appréhensions et du stress. Il est crucial de prévenir le possible décrochage de salariés non acclimatés aux nouveaux outils.
Une intégration indispensable de l’IA dans le dialogue social
L’IA supposant une appropriation collective de la technologie et de ses enjeux, il faudra compter sur les partenaires sociaux, acteurs incontournables, tant dans le déploiement que dans l’encadrement de ses usages, dans une logique d’anticipation de ses incidences.
L’IA protéiforme et évolutive, deviendra un sujet central du dialogue social, que cela soit au travers de consultation périodiques ou ponctuelles des représentants du personnel ou encore dans le cadre des négociations collectives obligatoires.
L’adoption progressive de l’IA impliquera une collaboration étroite des Ressources Humaines avec l’ensemble des parties prenantes : DPO, Directeur Juridique, Directeur de la Compliance, Directeur des SI, et Partenaires Sociaux, afin d’appréhender pleinement ce sujet aux multiples dimensions et conséquences et gérer cette transition sociétale.
L’IA sera ce que nous en ferons tous, collectivement.
Laure Hosni(Counsel), etClaire-Lisa Leclerc(Avocate senior en droit social), August Debouzy