Selon l’avocat général près la CJUE, si le droit de l’Union prévoit une obligation d’accepter des espèces en euros pour le règlement des créances de sommes d’argent, des motifs d'intérêt public peuvent justifier des limites à l’utilisation des billets de banque en euros comme moyen de paiement.
Deux citoyens allemands se sont vu refuser par l'organisme de radiodiffusion du Land de la Hesse le paiement en espèce de la redevance audiovisuelle.
Saisie de ce litige, la Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale, Allemagne) a formé une demande de décision préjudicielle auprès de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) afin de savoir notamment si les Etats membres dont la monnaie est l’euro peuvent adopter des règlementations nationales qui limitent l’utilisation des billets de banque libellés en euro.
Dans ses conclusions rendues le 29 septembre 2020 (affaires jointes C-422/19 et C-423/19), l'avocat général près la CJUE Giovanni Pitruzzella considère qu'en l’état actuel du droit de l’Union, la notion de "cours légal des billets de banque" doit être comprise dans le sens qu’elle comporte une obligation de principe d’acceptation des billets de banque en euros par le créancier d’une obligation de paiement, sous réserve de deux exceptions :
- le cas dans lequel les parties au contrat, dans l’exercice de leur autonomie privée, sont convenues d’autres moyens de paiement, différents du paiement en espèce ;
- le cas dans lequel l’Union ou un Etat membre dont la monnaie est l’euro, dans l’exercice de leurs compétences respectives, autres que celles relevant de la politique monétaire, ont adopté une réglementation qui, par son objectif et son contenu, ne constitue pas un encadrement du cours légal mais prévoit, pour des motifs d’intérêt public, des limitations à l’utilisation des billets de banque en euros comme moyens de paiement.
L'avocat général précise que de telles limitations ne sont toutefois compatibles avec la notion de "cours légal des billets de banque en euros" que si elles ne conduisent pas, de jure ou de facto, à une abolition complète des billets de banque en euros, si elles sont fondées sur des motifs d’intérêt public et s’il existe d’autres moyens légaux de règlement des créances de sommes d'argent.
Elles doivent, en outre, être (...)