L’autorité de la chose jugée attachée à la décision ayant rejeté une demande en paiement d’un créancier contre l’associé d’une SCI ne rend pas irrecevable une nouvelle demande en paiement formée après ouverture de la procédure collective.
Une banque, créancière de deux SCI au titre du solde débiteur de leurs comptes bancaires, a assigné les associés de ces deux sociétés en paiement de ces créances.
Deux jugements du 17 décembre 2018 ont rejeté ses demandes au motif que la banque ne démontrait pas avoir engagé de vaines et préalables poursuites à l'encontre des SCI.
Après avoir obtenu l'année suivante l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre des deux SCI, la banque a déclaré ses créances au passif de chacune de ces deux sociétés, puis a assigné leurs associés, notamment en paiement du solde débiteur des comptes bancaires de celles-ci.
La cour d'appel de Chambéry a déclaré les demandes irrecevables comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée attachée aux jugements rendus le 17 décembre 2018.
Les juges du fond ont retenu que c'est à la suite des deux jugements que la banque avait pris l'initiative de saisir le tribunal aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard des SCI, démarche qu'elle aurait dû accomplir avant les assignations en paiement délivrées aux associés.
Dans un arrêt du 18 janvier 2024 (pourvoi n° 22-19.472), la Cour de cassation censure ce raisonnement au visa des articles 1858 et 1355 du code civil et l'article 480 du code de procédure civile.
Elle rappelle que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.
En l'espèce, la liquidation judiciaire des SCI constituait un événement nouveau et il n’était pas établi que la liquidation aurait pu être prononcée avant les deux jugements du 17 décembre 2018 ni que la banque aurait pu satisfaire aux conditions de l’article 1858 du code civil avant cette date.