La taxation des bénéfices mis en réserve, objectif de la réforme
L´objectif de la réforme était de supprimer le FUT, et de taxer intégralement tous les bénéfices quel que soit l'affectation choisie. Objectif qui a été partiellement atteint si l´on prend en compte qu´à partir de 2017, les sociétés pourront opter pour l´un des deux systèmes d´impositions suivant :
- Système dit de « Revenu Attribué » (« Renta Atribuida »): L´actionnaire sera redevable par le biais de l´Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques de tous les bénéfices générées par l´entreprise, peu important leurs affectations. Autrement dit, si la Société A génère des bénéfices de 100 euros en 2017, la société paiera un Impôt de Première Catégorie de 25 euros (le taux d´imposition sera de 25%), et l´actionnaire devra payerl´Impôt sur le Revenu des Personnes Physique sur tous les bénéfices même s´ils ont été mis en réserve.A supposer que le taux d´imposition sur le revenu des personnes physiques de l´actionnaire soit de 35%, ce dernier devra payer 35 euros d´impôts sur le revenu desquels s´imputeront les 25euros préalablement versés au titre de l´Impôt de Première Catégorie. Le montant à verser par l´actionnaire sera donc de 10 euros, et le taux d´imposition global des bénéfices sera de 35%.
- Revenu dit « semi-intégré » (« Renta semi-integrada »): Les sociétés pourront opter pour conserver le système antérieur, actuellement en vigueur. Néanmoins, en choisissant cette option, le taux d´imposition de première catégorie sera, alors,de 27%, et le crédit d´impôt, à déduire de l’Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques de l´actionnaire, ne sera pas intégral. Seulement, 65% du montant payé au titre de l´Impôt de Première Catégorie pourra être déduit. Autrement dit, si la Société A dégage un bénéfice de 100euros, elle sera redevable d´un Impôt de Première Catégorie de 27 euros. L´unique actionnaire, s´attribuant les bénéfices intégralement en dividendes, devra payer au titre de l'Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques (à supposer que le taux d´imposition soit de 35%), 35 euros d'impôt desquels s´imputeront 17.55 euros (65% des 27 euros versés au titre de l´Impôt de Première Catégorie). L'actionnaire devra donc verser 17,45euros au titre de l´Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques. Par conséquent, l´impôt global payé sera de 44.45% des bénéfices.
En résumé, une société adoptant une politique favorisant la distribution de dividendes aura tout intérêt à opter pour le régime de « revenu attribué » tandis que si la société privilégie la mise en réserve des bénéfices, elle aura tout intérêt à choisir le régime des « revenus semi-intégré » qui prévoit une « exonération » d´impôts sur le revenu des personnes physiques des actionnaires.
En conclusion, cette réforme fiscale qui, au départ, se voulait simplificatrice du système fiscal ne fait qu´aggraver sa complexité en introduisant deux systèmes d´impositions différents.
Le gouvernement espère, toutefois, pouvoir récupérer 8.300 millions de dollars (USD) afin de financer des réformes de justice sociale visant à refonder, notamment, le système d´éducation chilien, qui est également source de discrimination. Un projet de réforme est d´ailleursen cours, et suscite déjà la fronde de l´opposition comme ce fut le cas pour la réforme fiscale.
Comme quoi, il n´y pas qu´en France, qu´un gouvernement se voit profondément affaibli par la mise en œuvre d´une réforme fiscale.
A propos de l'auteur
Benoît Renard, Avocat, Otero
Benoit Renard est un avocat français au Chili travaillant pour le Cabinet d´avocats Otero (www.otero.cl), partenaire de Granrut Avocats (www,granrut.com). Admis aux barreaux de Paris et de Madrid, il intervient aussi bien conseil qu´en contentieux sur des dossiers en français, en espagnol et en anglais.