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Le préjudice moral de l'épouse du dirigeant est-il distinct de celui des autres créanciers ?

Censure de l'arrêt d'appel qui dit irrecevables les demandes de l'épouse et associée du gérant au titre du préjudice moral sans rechercher si elle ne fondait pas sa demande sur la violence du comportement de son époux à l'occasion de sa gestion de la société, et notamment sur l'embauche de plusieurs de ses maîtresses, l'emploi de mots durs et blessants ou encore la confiscation à son avantage de toute sa fortune personnelle et familiale.

Mariés sous le régime de la séparation de biens, des époux ont créé une SARL, l'époux étant associé majoritaire et gérant, l'épouse associée minoritaire. Celle-ci a fait apport à la société d'une somme de 1.489.251 € inscrite en compte courant d'associé.
Un tribunal a ouvert le redressement judiciaire de la société puis prononcé sa liquidation judiciaire. L'épouse a déclaré une créance chirographaire de 1.305.900 €.
Elle a ensuite assigné en responsabilité son mari ainsi que l'expert-comptable qui avait été chargé notamment des formalités de constitution de la société afin d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de diverses sommes en réparation de son préjudice matériel et moral.

La cour d'appel de Nîmes a déclaré ses demandes irrecevables.
Les juges du fond ont retenu que lorsqu'elle décrivait son préjudice moral, la requérante faisait état essentiellement d'arguments financiers l'ayant conduite à la dépression, telle l'impossibilité de léguer à ses enfants un patrimoine dilapidé dans la gestion de la société, et que ce préjudice n'était pas distinct de celui des autres créanciers.

Ce raisonnement est invalidé par la Cour de cassation au visa des articles L. 223-22, L. 622-20 et L. 641-4, alinéa 4, du code de commerce.
Dans un arrêt rendu le 24 mai 2023 (pourvoi n° 21-21.871), la chambre commerciale reproche en effet aux juges du fond de ne pas avoir recherché si les fautes imputées au gérant, l'embauche au sein de la société de ses maîtresses, mieux payées qu'elle, l'emploi de mots durs et blessants, la confiscation à son avantage de toute sa fortune personnelle et familiale, n'étaient pas à l'origine d'un préjudice moral dont la réparation était étrangère à la reconstitution du gage commun des créanciers et si elle n'échappait pas en conséquence au monopole d'action du liquidateur.

© LegalNews 2023 (...)
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