Le gérant qui s'octroie une rémunération non autorisée par les associés ne commet pas de faute de gestion du moment que les associés ont, de fait, admis un droit à rémunération et que celle-ci ne s'est accompagnée d'aucune dissimulation.
Le liquidateur a fait assigner le gérant d'une société en nom collectif (SNC) devant le tribunal de commerce de Bobigny afin qu'il soit condamné à une mesure de faillite personnelle et à lui verser la totalité de l'insuffisance d'actif chiffrée, aux motifs qu'en percevant des rémunérations non autorisées par ses associés, le gérant avait frauduleusement augmenté le passif.
Le tribunal de commerce de Bobigny a jugé que la rémunération en cause, justifiée en son principe, n'était pas excessive au regard du chiffre d'affaires de la société et de la forte implication du gérant et de son épouse et qu'elle a ensuite été limitée avec l'accord des associés, qu'un actif avait été réalisé et qu'il était donc justifié de n'imputer au gérant qu'une aggravation de passif limitée.
Le gérant a fait appel du jugement, soutenant que sa rémunération, qui correspondait à un travail 7 jours sur 7 pour des horaires allant de 6 heures à 22 heures, était extrêmement raisonnable et en juste proportion avec le chiffre d'affaires réalisé, qu'elle se situait dans la fourchette admise pas ses associés et ne saurait constituer un abus de biens social.
Dans un arrêt du 22 février 2023 (n° 20/14517), la cour d’appel de Paris infirme le jugement.
Tout d'abord, elle rappelle qu'il incombe au liquidateur judiciaire, demandeur à l'action, de démontrer l'existence d'une insuffisance d'actif, d'une faute de gestion excédant la simple négligence et d'un lien entre la faute de gestion et l'insuffisance d'actif.
Ensuite, elle déduit des éléments qu'ils lui ont été soumis que si le montant de la rémunération due à au gérant n'a pas été formellement validé par les associés, ces derniers ont, de fait, admis un droit à rémunération correspondant à un travail dont l'ampleur n'est pas discutée.
Cette rémunération ne s'est accompagnée d'aucune dissimulation puisqu'elle était précisément individualisée dans les comptes que le gérant a voulu faire approuver lors des assemblées générales annuelles.
A l'exception de la rémunération plus importante perçue au titre de l'exercice 2009, (...)