Le Monde du Droit a interrogé Michael Jaffe sur son arrivée au sein de Taylor Wessing France.
Pourquoi avez-vous décidé de rejoindre Taylor Wessing ?
Suite à mon départ de chez PwC, je cherchais un cabinet en développement à l'échelle internationale dans lequel je pourrais mettre à profit mon expérience française et américaine. J’aime travailler dans un contexte de réseau international et cette opportunité de développer une clientèle française et européenne depuis New York me passionne. J'ai passé plus de 30 ans de ma carrière à œuvrer dans la construction des plus grands réseaux au monde et j'ai souhaité continuer sur cette lancée aux côtés de Taylor Wessing.
Pouvez-vous nous décrire votre parcours ?
Je suis un Californien pure souche, originaire de Los Angeles. J'ai étudié le français et la philosophie à l’Université de Berkeley, suivi par un an d'études en France. J'ai effectué la première partie de mes études de droit en Californie avant d’intégrer un 3ème cycle à l'université de Paris I et II.
J'ai commencé ma carrière d’avocat à Los Angeles avant de prendre mes fonctions chez PwC en 1984. J’ai ensuite rejoint le bureau Parisien de PwC où j'ai participé au développement des pratiques de fiscalité patrimoniale, de systèmes de rémunération et d’épargne salariale. J’ai découvert une culture fondée sur le travail en équipe, l’excellence et les synergies découlant des réseaux internationaux. En 2013, j'ai été nommé managing partner de PwC Société d'Avocats.
J'ai la chance de bénéficier d’une double nationalité franco-américaine et cette culture "resto-verso" me plaît particulièrement. Je vis en France depuis plus de 30 ans. Je ne suis donc plus un "pur" produit américain aux Etats-Unis, et pour autant, pour les Français je suis parfois perçu comme un martien avec mon côté "relax" et mon bronzage californien.
Qui a le plus influencé votre carrière ?
Mes clients. J'ai eu le privilège de travailler avec des milliers de personnes. La fiscalité patrimoniale implique confiance et confidentialité, raison pour laquelle je ne citerai aucun nom de client. Mais travailler avec les dirigeants de société CAC40, Fortune 500 et FTSC100, ainsi qu'un certain nombre d’hommes politiques, d'artistes et de sportifs de nationalités différentes est une expérience humaine extraordinaire qui va bien au-delà de la technicité juridique. Ma satisfaction repose aussi dans la réussite de mes clients.
Au-delà de mes clients, j'ai été très influencé dans ma carrière par trois personnes :
Bernard Gainnier, Président de PwC France, pour son courage. Bernard fait preuve d’une stabilité et d’une profonde conviction, qualités indispensables pour mener une transformation technologique dans le conseil. Ce que j'admire le plus chez lui est sa ténacité et sa capacité à garder le cap malgré une forte résistance. Il faut beaucoup d'écoute et un profond respect de l’autre.
Les deux autres personnes sont liées à mes origines de Los Angeles : Groucho Marx pour son humour et son sens de l'ironie, Fred Astaire pour son élégance. Même si le droit est un domaine très sérieux et solennel, je suis convaincu qu'un soupçon d'humour et d'élégance nous aide dans la communication avec nos clients.
Quel est votre meilleur souvenir dans votre carrière ?
J'ai beaucoup de très bons souvenirs en 30 ans de carrière, mais je me souviens particulièrement d’un jour où PwC a remporté un appel d'offre pour une société du CAC40. Notre offre impliquait plus de 100 juridictions une équipe multilingue, multiculturelle, multiraciale. Nous avions largement répété pour la présentation et, le jour J, chaque membre de l'équipe a réalisé une performance digne d’un Oscar. La satisfaction procurée par ce succès résultant d’un effort collectif m'est très chère.
Quels sont vos domaines de compétences ?
J'interviens dans les aspects juridiques liés aux fortunes privées lorsqu’il existe un élément international. Cela inclut la palette fiscale telle que l’impôt sur le revenu, l’ISF, les donations et droits de succession, les trusts. J'ai également beaucoup travaillé dans les domaines liés à ce qu'on appelle le "Reward" ou "Compensation and Benefits". Typiquement, il s'agit là de questions liées aux systèmes de rémunération (salaire de base, bonus, avantages en nature, stock-options, actions gratuites) et au timing (cash, rémunération différé, retraite).
Quelles sont, selon vous, les actualités marquantes de ces dernières semaines dans ces secteurs d'activité ?
Je pense à quatre actualités marquantes récentes.
D'abord, la mise en place du système fiscal de retenue à la source des impôts. La France est parmi les derniers pays développés à mettre en place le modèle "Pay as you earn" (PAYE). Cela implique un certain nombre de questions, notamment sur la vie privée des salariés, la renégociation des contrats avec les prestataires de paie, les modalités pour les employeurs situés à l'étranger, les différentes façons d'aborder l'année "blanche" d'impôts.
Ensuite, malgré le Brexit, la presse vient de publier un article sur le transfert de plus de 60 traders d'une banque néerlandaise à Londres. Tout le monde attend l'exode de la communauté financière de Londres vers le Continent et pourtant, de manière contre-intuitive, on a cet exemple.
J’ai été marqué également par le retrait de 41 millions de dollars d'actions non acquises au détriment du PDG de Wells Fargo, suite à la création de comptes fictifs ; compte tenu des règles de plus en plus strictes en matière de gouvernance, il vient de démissionner de ses fonctions.
Enfin, la condamnation de M. Cahuzac a bien-entendu marqué les esprits, suite à la découverte de comptes bancaires non déclarés détenus à l'étranger.
Qui conseillez-vous ?
Je conseille principalement des personnes physiques, mais également les directions des ressources humaines, les dirigeants, les comités de rémunération et les organes de gouvernance. Ces derniers deviennent d’ailleurs plus impératifs que consultatifs dans le cadre du projet de loi Sapin 2 prévoyant de durcir l’application du principe de vote des actionnaires sur la rémunération des dirigeants en Assemblée Générale ("Say on Pay"). Concernant les personnes physiques, les DRH ou les successions, j'interviens surtout lorsqu'il y a un aspect international.
Quels sont vos objectifs pour ce cabinet ?
Mon ambition est de développer la clientèle américaine de Taylor Wessing. J’interviendrai principalement à partir de New York afin de faire connaître la marque. Je continuerai en parallèle à intervenir pour des clients français dans le cadre de leur développement aux Etats-Unis et en Europe.
Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier)
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