Une juridiction nationale peut ordonner la production de preuves aux fins d’une procédure en dommages et intérêts liée à une infraction présumée au droit de la concurrence, même si la procédure a été suspendue en raison de l’ouverture par la Commission d’une enquête portant sur cette infraction.
La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a été interrogée par la Cour suprême tchèque quant à l’interprétation de la directive n° 2014/104/UE du 26 novembre 2014 sur les actions en dommages et intérêts se rattachant aux infractions au droit de la concurrence, en ce qui concerne la production de preuves dans de telles procédures.
Plus précisément, la juridiction souhaitait savoir si les juridictions nationales peuvent enjoindre la production de documents relatifs à une infraction présumée au droit de la concurrence, alors que la procédure sous-jacente à cette injonction et se rapportant à une action en dommages et intérêts relative à l’infraction en cause a été suspendue dans l’attente d’une décision de la Commission.
Dans un arrêt rendu le 12 janvier 2023 (affaire C-57/21), la CJUE rappelle tout d'abord qu’une juridiction nationale ne peut pas adopter une décision qui irait à l’encontre de la décision que la Commission envisage d’adopter dans le cadre d’une procédure initiée en raison d’une infraction présumée au droit de la concurrence de l’Union.
Dans la mesure où cette exigence est respectée, une juridiction nationale peut, en principe, ordonner la production de preuves aux fins d’une procédure en dommages et intérêts se rattachant à une telle infraction, même si cette procédure a été suspendue dans l’attente d’une décision de la Commission sur cette infraction. La juridiction nationale doit alors s’assurer que la production de preuves est effectivement nécessaire et proportionnée aux fins de l’appréciation de la demande indemnitaire en cause.
La CJUE considère en l'espèce que le fait que l’autorité de concurrence tchèque a suspendu la procédure engagée devant elle en raison de l’ouverture par la Commission d’une procédure d’enquête portant sur les mêmes faits ne peut être assimilé à une clôture de la première procédure par cette autorité. Par conséquent, une telle suspension de la procédure nationale ne permet pas à la juridiction nationale d’ordonner la (...)