Grenelle du droit : la réflexion sur l'union des professions du droit est lancée

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Le Grenelle du droit, organisé par l’AFJE et le Cercle Montesquieu, a réuni près de 1.000 personnes jeudi 16 novembre 2017 à la Maison Mutualité. La question de la compétitivité et de la place du droit français était au centre des débats. L'union entre les professionnels du droit apparaît pour les participants comme une nécessité afin de rendre le droit français compétitif.

Deux constats ont conduit à l’organisation de cet événement dans le but de fédérer les professionnels du droit pour créer une filière juridique. Tout d’abord, malgré une formation commune, peu de professionnels du droit s’identifient comme appartenant à la même filière. Puis, il apparaît que le droit est une industrie créatrice de valeurs représentant 31,1 milliards d’euros et 432.000 emplois directs selon l’étude de l’Observatoire des acteurs économiques du droit. Dans le contexte du Brexit, ce marché déjà dynamique peut encore progresser selon Nicolas Guérin, Président du Cercle Montesquieu, « en faisant revenir des sièges sociaux depuis l’Angleterre vers la France ». Pour ce faire, il faut que « tous les professionnels du droit s'unissent pour rendre la place de Paris et les autres places du droit en France attractives pour ces sièges sociaux ».

« Le droit ne doit pas devenir une arme au profit de certaines puissances économiques notamment comme les Etats-Unis ou certains pays anglo-saxons. Notre droit peut devenir un levier pour une puissance économique comme la France. Il faut donc valoriser notre droit continental »

De même, le droit anglo-saxon est souvent perçu de manière plus attrayante ou plus facile les négociations internationales alors même que « 70 % des juristes travaillent sur des questions internationales dans des groupes français », fait observer Stéphanie Fougou, Présidente de l’AFJE. « Le droit ne doit pas devenir une arme au profit de certaines puissances économiques notamment comme les Etats-Unis ou certains pays anglo-saxons. Notre droit peut devenir un levier pour une puissance économique comme la France. Il faut donc valoriser notre droit continental », ajoute-t-elle.

« Si l’on veut améliorer la compétitivité de la norme, il faut créer un rapport dynamique entre ceux qui fabriquent la norme et ceux qui la reçoivent »

Une fois ces constats posés, comment rendre le droit français plus compétitif ? La compétitivité d’une norme est une notion récente qui s’apprécie par « l’aptitude d’un système juridique à attirer des activités », explique Guy Canivet, Président du Haut Comité Juridique de la place financière de Paris. « Si l’on veut améliorer la compétitivité de la norme, il faut créer un rapport dynamique entre ceux qui fabriquent la norme et ceux qui la reçoivent. »

Rétablir le dialogue entre les professions

Pour Aurélien Hamelle, directeur juridique chez Total, il faut battre en brèche cette idée que le droit français est plus compliqué qu’un autre. Par ailleurs, « l'attractivité du droit n'est pas qu'une question de droit. Il y a une force de propulsion qui est ailleurs que dans le droit ». Les entreprises ont un rôle à jouer, « une responsabilité pour propulser leurs avocats en dehors de leurs frontières ».
« Notre grande faiblesse en France, c’est qu’on a l’impression d’appartenir tous à des mondes différents, quand vous avez des systèmes plus symbiotiques à l’étranger », ajoute le directeur juridique de Total.
Pour remédier à cela, il faut réfléchir à l’attractivité de la filière juridique à travers la formation, les soft skills et les autres « savoir-être » que les professionnels du droit doivent développer, souligne Kami Haeri, Avocat chez Quinn Quinn Emanuel Urquhart & Sullivan et auteur du rapport sur l’avenir de la profession d’avocat. De même, la réflexion doit porter sur la mobilité. « Il y a une balkanisation de la filière ». Aussi, il recommande de « rétablir le dialogue » entre les différentes professions et d’ « harmoniser les passerelles ».
Le droit doit également être adapté aux besoins des utilisateurs et ne pas être trop rigide pour attirer les entreprises fait observer Louis Vogel, avocat fondateur du cabinet Vogel & Vogel.
La question des moyens ne doit pas être éludée. « Il faut mettre des moyens sur la table pour que Paris puisse traiter tous les litiges internationaux. Ça créera de la valeur », affirme Franck Gentin, Président de Paris place de droit.

Développer la transversalité

Lise Damelet, avocat et cofondatrice de l’incubateur du barreau de Paris, évoque également la nécessité d’avoir une démarche transversale entre les différents acteurs de la filière (juristes, avocats, magistrats…). En ce qui concerne le numérique, une solution envisagée par le réseau national des incubateurs est de créer une plateforme commune avec en parallèle un fonds d’investissement dédié à l’innovation juridique.

« Il faut aussi une solidarité de la place de droit entre les différents acteurs. Le nombre de juristes est là. La procédure est de qualité mais le problème est qu’elle n’est pas utilisée dans toutes ses potentialités. Enfin, il faut que les juristes se mobilisent pour comprendre que leur destin est lié pour valoriser la place du droit. C’est seulement une fois que cet écosystème et cette solidarité seront créés que le droit français sera compétitif  », conclut Guy Canivet.

Ce premier Grenelle du droit s'est achevé par la création du mouvement « Tous droits devant », regroupant trente signataires afin de réunir les professionnels du droit et œuvrer pour l’avenir de la filière juridique. Des propositions seront prochainement transmises au ministère de la Justice. Rendez-vous est pris le 16 novembre 2018 pour la deuxième édition du Grenelle du droit.

Arnaud Dumourier (@adumourier)


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