Marion Wagner et Danièle Broudeur, qui enseignent toutes deux à l'Université Catholique de Lyon, reviennent sur la notion de justice restaurative et la nécessité de la mettre en pratique en France le plus rapidement possible.
Réparer l’irréparable... La notion de justice restaurative est entrée dans le droit français en 2014 par la porte du droit pénal. Selon l’article 10-1 du Code de procédure pénale, une mesure de justice restaurative peut être proposée à la victime ou à l’auteur de l’infraction à l’occasion de toute procédure et à tous les stades, « y compris lors de l’exécution de la peine ». Cette mesure est entendue comme une pratique permettant aux deux parties de trouver un espace de dialogue pour réparer les préjudices résultant de l’infraction, avec le triple objectif de prendre en compte la victime, l’auteur et la société. Il s’agit d’aller au-delà de la sanction pour donner une nouvelle ambition à la justice pénale. Après le procès, victime et auteur doivent pouvoir reprendre leur vie et surtout leur place dans la société. Mais si elle est nécessaire, la sentence est incapable de restaurer le lien social abîmé. La justice restaurative apporte un outil social de réparation qui faisait défaut au droit pénal.
Dans la pratique, la justice restaurative implique volontariat et confidentialité. Chaque mesure est mise en œuvre par un tiers indépendant formé à ces pratiques, qui met en lien auteur et victime, sous le contrôle d’un juge ou de l’administration pénitentiaire (circulaire du 26 sept. 2014). Par le dialogue et la reconnaissance de la souffrance de l’autre, par le besoin partagé de se reconstruire, victime et auteur peuvent se réparer l’un l’autre. La rencontre se prépare avec des facilitateurs, présents le jour de la séance restaurative, où chacun pourra exprimer son ressenti, toutes les choses essentielles impossibles à dire pendant le procès.
Toute récente en France, la justice restaurative se met en place lentement, car elle implique une véritable révolution philosophique et engage de multiples dimensions dans sa médiation réparatrice. L’une des clés est la formation pluridisciplinaire à cette nouvelle approche de règlement des conflits et de la justice comme outil de réparation, pas seulement financière, mais aussi psychologique. Ces pratiques de justice restaurative doivent être transmises dès que possible dans le parcours des étudiants en droit pour bâtir une justice du XXIème siècle pragmatique et restaurative.
Marion Wagner, Directrice du Master Droit privé parcours Droits de l'enfant et des personnes vulnérables, Directrice du Certificat Universitaire Médiation restaurative, Directrice du Certificat Universitaire Droits Debout : les droits fondamentaux des personnes privées de libertés de l’Institut des Sciences de la Famille de l’UCLy et Danièle Broudeur, Psychologue, Fondatrice du Certificat Universitaire Médiation restaurative, ancienne Directrice du Diplôme d’État de Médiateur Familial (DEMF) de l’Institut des Sciences de la Famille de l’UCLy.