Délivrance tardive du permis de communiquer à l'avocat

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Il n’y a pas de violation des droits de la défense en raison d’une délivrance tardive à l’avocat du permis de communiquer lorsque la demande initiale était irrégulière, ni lorsque l’avocat n’a pas pu s’entretenir avec son client au centre pénitentiaire en raison de carences de l’administration, mais qu’il en a eu la possibilité avant le débat contradictoire, dans un local prévu à cet effet, et n’a pas demandé de report du débat.

Un homme a été mis en examen le 3 juin 2023 des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs et provisoirement incarcéré dans l'attente d'un débat contradictoire différé fixé au 7 juin.
Lors du débat contradictoire, le juge des libertés et de la détention (JLD) a constaté qu'aucun permis de communiquer n'avait été délivré aux avocats du mis en examen, bien qu'ils l'aient sollicité, pour l'un, par courrier électronique le 5 juin, pour l'autre, oralement, au greffe du juge d'instruction.
Ce magistrat a renvoyé le débat au lendemain, 8 juin, à 14h et les permis sollicités ont été immédiatement transmis aux avocats par voie électronique.
Dans la matinée du 8 juin, l'avocate du mis en examen s'est rendue au parloir de l'établissement pénitentiaire afin de rencontrer son client, mais, en raison d'un incident au centre pénitentiaire, n'a pu communiquer avec lui. Elle s'est entretenue avec lui au tribunal entre 14h et 14h10.
A l'issue du débat contradictoire, qui a commencé à 14h15, où les avocats du mis en examen, ayant invoqué leurs contingences professionnelles, n'étaient pas présents, le JLD a placé l'intéressé en détention provisoire.

Pour la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, il n'y a pas eu violation des droits de la défense en raison d'une délivrance tardive des permis de communiquer.
Les juges du fond ont relevé que, sollicités les 5 et 6 juin, ils avaient été délivrés aux avocats du mis en examen le 7 juin à 15h22 et 15h30.
Ils ont ajouté que la demande de permis faite par l'un des avocats, le 5 juin, était ambigüe en ce qu'elle n'apparaissait dans son courrier électronique qu'en seconde position, après une demande de copie du dossier et qu'elle n'est pas reprise dans l'objet de ce courrier, et que la demande formulée par l'avocate, directement au cabinet du juge d'instruction, le 6 juin, n'avait pas été formulée par écrit.

Dans un arrêt rendu le 19 décembre 2023 (pourvoi n° 23-85.642), la Cour de cassation considère que c'est à juste titre que la chambre de l'instruction a retenu que la demande de l'avocat transmise par messagerie électronique, le 5 juin 2023, était irrégulière en ce qu'elle ne mentionnait pas dans son objet la délivrance d'un permis de communiquer, de sorte qu'elle avait un caractère ambigu. La chambre criminelle ajoute qu'il se déduit des termes mêmes de l'article D. 32-1-2 du code de procédure pénale que le permis de communiquer doit être sollicité par écrit, afin de donner date certaine à cette demande. Dès lors, la demande de permis de communiquer formée oralement par l'avocate était également irrégulière.

La Haute juridiction judiciaire approuve également l'arrêt d'appel en ce qu'il a écarté le moyen de nullité selon lequel les droits de la défense n'auraient pas été assurés, faute pour l'avocat d'avoir pu s'entretenir avec son client avant le débat différé, au motif que le JLD avait renvoyé le débat contradictoire, initialement fixé au 7 juin, au lendemain à 14h afin que les avocats puissent s'entretenir avec leur client.
Les juges avaient précisé que s'il est évidemment regrettable qu'un blocage des mouvements en détention en raison de la survenue d'un incident au quartier arrivants ait empêché l'avocate de rencontrer son client à l'heure convenue, dans la matinée du 8 juin 2023, au parloir avocat du centre pénitentiaire, les avocats du mis en examen avaient néanmoins eu la possibilité de s'entretenir confidentiellement avec lui au palais de justice avant le débat contradictoire, et ce tant le 7 juin que le 8 juin.

La chambre criminelle considère que :
- dans son courrier adressé au JLD, le 8 juin à 12h07, l'avocate n'avait pas fait état d'un incident l'ayant empêchée de rencontrer son client dans la matinée au centre pénitentiaire, expliquant simplement qu'elle ne pourrait assister au débat fixé l'après-midi en raison d'autres obligations professionnelles ;
- il ressort d'un rapport des services de police que l'avocate avait a pu s'entretenir avec le mis en examen le 8 juin, date de renvoi du débat, entre 14h et 14h10, dans le local prévu à cet effet, avant le début du débat différé, auquel elle n'a pas assisté ;
- il était loisible à l'avocat du mis en examen, s'il estimait indispensable de s'entretenir plus longuement avec son client, de demander, à cet effet, un report du débat contradictoire de quelques heures.

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