Dans notre article consacré aux systèmes de répartition du résultat dans les cabinets d’avocats, nous avions mis en avant la nécessité d’adopter des systèmes de répartition mixtes, cassant le schéma des extrêmes que sont le lock-step d’une part, le « eat what you kill », d’autre part. Nous avions ensuite examiné les différents critères permettant d’envisager une répartition du résultat complète et harmonieuse. Par Caroline Neveux, Jurimanagement
Au-delà des considérations techniques préalablement abordées, nous souhaiterions clore ce volet consacré à la répartition du résultat dans les cabinets d’avocats en insistant sur les principes de gouvernance qui doivent animer les associés des cabinets.
Pas de répartition sereine sans une gouvernance claire
La répartition du résultat, pour être bien vécue, doit être clairement énoncée et acceptée, d’une part, et répondre aux objectifs que s’est fixée l’entreprise d’avocats, d’autre part.
A ce titre, la répartition du résultat est un exercice en rapport direct avec les modes de gouvernance qui doivent prévaloir dans les cabinets.
La gouvernance n’est pas l’apanage des grands
Cet adage est particulièrement vrai dans le cas particulier des structures d’avocats.
Rappelons en effet que la particularité de l’entreprise d’avocats, est en général de réunir en son sein un nombre conséquent d’associés, dirigeants et producteurs à la fois, mus par un esprit libéral, de surcroît.
Partant, à la difficulté classique d’établir des règles de fonctionnement entre les acteurs impliqués et à déterminer les objectifs qui gouvernent l’entreprise, se rajoute dans le cas particulier du cabinet, la pluralité des acteurs-décideurs et la difficulté à mettre en avant le jeu collectif que connaissent tant d’avocats. Il est fréquent, à ce titre, de rencontrer des processus de décision longs, complexes et contre efficaces dans ces structures.
L’appréhension de l’ensemble des processus influençant la manière dont le cabinet sera dirigé, administré et contrôlé devient, de ce fait, plus compliquée mais tout aussi primordiale.
Quant à la réflexion à mener concernant les objectifs stratégiques, principe même de la gouvernance et trop souvent ignorée dans les structures libérales, elle constitue la justification même de systèmes de rémunérations partiellement décorrélés de la facturation et garants du développement de l’entreprise. Rappelons-nous, à ce titre, de la célèbre phrase de David Maister, professeur à Harvard et « pape » des services professionnels : « ce que tu fais de tes heures facturables détermine ton présent, ce que tu fais de tes heures non facturables détermine ton avenir ».
Répartir le résultat signifie également se déterminer sur l’emploi des heures non facturables…
Pourquoi ne pas écrire une Charte ?
Il est de plus en plus fréquent que les associés des cabinets viennent à nous avec pour besoin celui de clarifier leur mode de fonctionnement interne entre associés. Ce besoin est dicté, d’une part par la nécessité d’un débat consensuel et ouvert sur la politique stratégique du cabinet et d’autre part, par le souhait d’offrir de la visibilité aux entrants et enfin par le besoin de mettre en place, le plus souvent, des règles de fonctionnement en matière de gestion et de qualité.
La résultante en est la mise en place de règles de répartition adaptées et compatibles avec les politiques préalablement prônées. Il ne faut pas s’y tromper, l’exercice de la répartition du résultat sera d’autant plus serein qu’il reflétera le mode de fonctionnement global de la structure.
La difficulté réside en général dans le temps qu’il convient de prévoir pour mettre en place une Charte dite de gouvernance. D’un exercice qui peut paraître simple à 3 ou 4 associés, on passe rapidement à un effort de réflexion qui s’étale sur plusieurs mois tant sont généralement nombreux les sujets à évoquer et à résoudre.
A titre indicatif, lorsque le cabinet entame la rédaction d’une Charte de gouvernance, nous lui conseillons de procéder par ordre et de traiter les sujets suivants, les plus fréquemment abordés dans les chartes :
• Valeurs
• Fonctionnement entre associés
• Stratégie et développement
• Règles de répartition du résultat
• Critères et chemin d’association
• Gestion et qualité
Enfin, il est nécessaire de rappeler que, tout comme les chartes, les règles de répartition du résultat évoluent et qu’il est souhaitable de les revoir à périodicité constante afin de rester proche des considérations liées au développement du cabinet. A ce stade de notre réflexion, nous pouvons indiquer que la durée de vie de ce type de système est de l’ordre de 3 à 4 années.