Le rapport d'information des députés Philippe Gosselin et Naïma Moutchou sur l'aide juridictionnelle contient 35 propositions pour faciliter l’accès à l’aide juridictionnelle, la revaloriser pour les justiciables et les auxiliaires de justice et en assurer le financement.
Après 21 auditions (juges, greffiers, justiciables, auxiliaires de justice, assureurs), Philippe Gosselin (LR) et Naïma Moutchou (LREM) dressent un état des lieux et formulent 35 propositions pour faciliter l’accès à l’aide juridictionnelle, la revaloriser pour les justiciables et les auxiliaires de justice et en assurer le financement.
30 ans après la mise en place du dispositif actuel d’aide juridictionnelle par la loi du 10 juillet 1991, ce système apparaît néanmoins fragilisé par une l'augmentation importante du nombre de bénéficiaires.
En effet, le nombre d’admissions est passé de 388.250 en 1992 à 688.637 en 2002 avant d’atteindre 915.563 en 2012 et 985.110 en 2017.
Les bureaux d'aide juridictionnelle sont débordés. Ce qui a pour conséquence d'allonger les délais de traitement des dossiers.
Conjuguée à l’amélioration de la rétribution des auxiliaires de justice, elle a également engendré une croissance continue des dépenses d’aide juridictionnelle qui atteignent, en 2018, 472 millions d’euros. « Les avocats dénoncent, de manière constante, l’insuffisance de leur rétribution », soulignent les auteurs du rapport.
Faciliter l’accès à l’aide juridictionnelle
Si la mission salue la dématérialisation de l’aide juridictionnelle avec le système d’information de l’aide juridictionnelle (SIAJ) qui devrait être en place au seconde semestre 2020, elle estime nécessaire de conserver un contact humain notamment pour les « personnes les plus éloignées des nouvelles technologies ». Pour ce faire, elle recommande que le formulaire de demande d’aide juridictionnelle soit toujours disponible dans sa version papier, que les bureaux d’aide juridictionnelle soient déchargés de leur mission d’accueil du public au profit des services d’accueil unique du justiciable (SAUJ), que l’aide juridictionnelle soit mieux articulée avec l’aide à l’accès au droit qui est mise en œuvre par les conseils départementaux de l’accès au droit.
Par ailleurs, les rapporteurs proposent la mise en place d’un dossier unique par justiciable pour éviter la multiplication des demandes et simplifier les démarches. Pour améliorer le traitement de la demande, ils préconisent de regrouper les bureaux d’aide juridictionnelle au niveau des cours d’appel et de renforcer la place des magistrats en leur sein.
De même, la mission propose de revoir les conditions de ressources pour l’attribution de l’aide juridictionnelle et de retenir comme critère d’éligibilité le revenu fiscal de référence, afin de mettre fin aux inégalités de traitement générées par la diversité des pratiques des bureaux d’aide juridictionnelle en matière d’appréciation de ces ressources.
La mission propose également de prévoir, lorsque la juridiction est déjà saisie, que l’assignation ou la requête soit produite à l’appui de la demande pour permettre un examen sur le fond et d’introduire en matière civile, en appel, des critères plus rigoureux relatifs au bien-fondé de la procédure et à la proportionnalité de l’enjeu à la demande.
Pour éviter les demandes abusives, les rapporteurs proposent de prévoir, lorsque la juridiction est déjà saisie, que l’assignation ou la requête soit produite à l’appui de la demande pour permettre un examen sur le fond et d’introduire en matière civile, en appel, des critères plus rigoureux relatifs au bien-fondé de la procédure et à la proportionnalité de l’enjeu à la demande. Il est également proposé de diffuser auprès des bureaux d’aide juridictionnelle les dispositions et les décisions les plus emblématiques sur le caractère irrecevable ou dénué de fondement d’un recours.
Philippe Gosselin et Naïma Moutchou préconisent aussi le relèvement des plafonds d’admission à l’aide juridictionnelle au niveau du SMIC net mais aussi d’accorder l’aide juridictionnelle, de plein droit, sans condition de ressources aux victimes de violences conjugales, dès le dépôt de plainte.
Un droit de timbre de 50 euros
Afin de garantir le financement de l’aide juridictionnelle, les députés proposent de revenir à un droit de timbre de 50 euros pour les contentieux civils et administratifs. Le produit serait affecté à un compte spécial destiné à financer le relèvement des plafonds d’admission à l’aide juridictionnelle au niveau du SMIC net. L’attribution serait de plein de droit pour l'aide aux victimes de violences conjugales.
Cependant, les rapporteurs ne sont pas d'accord sur la nécessité de soumettre les bénéficiaires de l’aide juridictionnelle à ce droit de timbre : Naïma Moutchou estime qu’ils doivent en être exonérés tandis que Philippe Gosselin considère qu’une contribution s’élevant à un « demi-timbre » doit être prévue.
En ce qui concerne le recouvrement des aides indûment versées au titre de l’aide juridictionnelle, en 2018, le taux de mise en recouvrement a poursuivi sa baisse entamée en 2013 pour s’établir à 4,6 %, soit 4 points de moins qu’en 2008. Il est donc proposé de forfaitiser le montant à recouvrer pour améliorer le recouvrement.
Enfin, la mission formule plusieurs propositions pour mieux articuler l’aide juridictionnelle et l’assurance de protection juridique : prévoir que la prime relative à l’assurance de protection juridique fait l’objet d’une mention spécifique dans l’avis d’échéance du contrat ; élargir les garanties minimales qui figurent dans un contrat d’assurance de protection juridique ; étendre le champ des litiges couverts par l’assurance de protection juridique à de nouveaux contentieux ; étendre l’assurance de groupe aux contrats d’assurance de protection juridique ; dématérialiser la procédure de transmission de l’attestation de l’assureur ; systématiser les échanges entre les bureaux d’aide juridictionnelle et les assureurs.
Arnaud Dumourier (@adumourier)
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