Dans le dossier du rapprochement des groupes Casino et Intermarché, la Cour de cassation confirme que les agents de la DGCCRF n'ont pas utilisé de procédé déloyal pour obtenir les pièces produites par le ministre chargé de l'Economie.
En 2014, à la suite du rapprochement des groupes Casino et Intermarché visant à conserver un positionnement concurrentiel, la centrale de référencement du groupe et une société regroupant des commerçants indépendants ont créé une société ayant pour mission de négocier, à titre exclusif, pour ses sociétés mères les conditions d'achat des produits et la conclusion de la convention annuelle avec certains fournisseurs.
A la suite d'une enquête menée en 2016 par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), le ministre de l'Economie, leur reprochant d'avoir, par cette opération, violé les dispositions de l'article L. 442-6, I, 2°, du code de commerce, dans sa version alors applicable, a assigné les différentes sociétés en cessation de leurs pratiques et en paiement d'une amende civile.
Soutenant que des pièces avaient été obtenues par un procédé déloyal, ces sociétés ont, par une procédure avant dire droit, demandé à ce qu'elles soient écartées et à ce que l'assignation et la procédure soient déclarées nulles.
La cour d'appel de Paris a rejeté leurs demandes.
Sur les demandes d'informations complémentaires du 3 août 2016, les juges du fond ont retenu que les tableaux standardisés, adressés aux fournisseurs des sociétés poursuivies, n'avaient pas pour finalité de confirmer les conclusions provisoires des enquêteurs quant à l'existence des pratiques restrictives de concurrence, mais de les compléter.
Les juges ont relevé que ces tableaux avaient été diversement renseignés, certains ayant fait l'objet d'une confirmation succincte par la reprise des éléments préremplis par l'administration, tandis que d'autres avaient donné lieu à de nombreuses précisions et rectifications.
Ils en ont déduit que leurs destinataires, qui, de par leur appartenance à des grands groupes multinationaux, étaient particulièrement avertis et aptes à mesurer les enjeux de la procédure, avaient conservé toute leur liberté de réponse.
Les juges ont ajouté que le procédé ainsi décrit était transparent et que les éléments recueillis n'étaient donc affectés d'aucune déloyauté.
Sur les auditions de décembre 2016, la cour d'appel a relevé qu'alors que l'enquête était très avancée, les agents de la DGCCRF avaient, une nouvelle fois, soumis leur analyse des pratiques en cause aux fournisseurs concernés.
Les juges ont retenu que ce procédé n'étaient pas en soi condamnables puisque les affirmations des enquêteurs s'appuyaient sur une lecture d'éléments objectifs, que les réponses des fournisseurs étaient clairement distinguées et que ces derniers avaient à nouveau manifesté leur aptitude à répondre librement, en contredisant, le cas échéant, leur interlocuteur ou en soulignant leur incapacité à commenter les indications ainsi soumises à leur appréciation.
Ils ont ajouté que le procédé était transparent et que les réponses avaient été librement données.
Les juges en ont déduit l'absence de toute déloyauté de ce mode d'obtention de preuve.
Dans un arrêt du 29 janvier 2025 (pourvoi n° 23-15.828), la Cour de cassation considère qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d‘appel a pu retenir que les agents de la DGCCRF n'avaient pas utilisé un procédé déloyal pour obtenir les pièces produites par le ministre chargé de l'Economie.
Les pourvois des sociétés sont donc rejetés.