Les enseignements de la Singapore Convention Week 2023

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Annette Magnusson, Co-fondatrice, Climate Change Counsel (Stockholm), revient sur les principaux enseignements de la Singapore Convention Week 2023.

Quels ont été les principaux enseignements de la Singapore Convention Week 2023 ?

Il est devenu évident que les juristes se tournent de plus en plus vers les marchés du carbone. Le sondage réalisé au début de notre panel sur les litiges liés au marché du carbone a révélé que même si les marchés du carbone constituent un territoire inconnu pour de nombreux avocats, le public était plus à l'écoute que ce à quoi on aurait pu s'attendre.  

Au titre de l’article 6 de l’Accord de Paris, les marchés de conformité, les marchés volontaires du carbone et le commerce du carbone sont les domaines dans lesquels nous pouvons nous attendre à une forte adoption dans le secteur juridique à venir. Les avocats qui ne connaissent pas encore cet espace doivent s’y mettre. 

Comment concrètement peut-on faire évoluer la résolution des différends liés au changement climatique ? 

Les différends liés au changement climatique sont très variés. Il s’agit de litiges climatiques devant les tribunaux aux niveaux national et international (dans le passé principalement contre des gouvernements et des organismes publics, mais récemment et de plus en plus d’acteurs privés), mais également d’autres types de litiges.  

Par exemple, les différends liés au changement climatique incluent également les différends en matière d’investissements internationaux ayant une incidence sur la transition climatique. Ici, l’un des défis réside dans le conflit potentiel entre les normes au niveau international. Un exemple controversé est le conflit entre le droit international des investissements et le droit du changement climatique, comme l’illustre par exemple les troubles politiques entourant le traité sur la Charte de l’énergie.  

Pour relever le défi des normes contradictoires dans les litiges liés au changement climatique, les avocats doivent élargir leurs connaissances. Cela inclut non seulement l'application de nouvelles normes, notamment les accords internationaux sur le climat, le droit des droits de l'homme et le droit de l'environnement dans les affaires fondées sur des contrats commerciaux, mais aussi les aspects pratiques permettant de comprendre le rôle approprié de la science du climat à différentes étapes des différends, ou comment pour évaluer les dommages, par exemple dans les cas impliquant des actifs fossiles laissés en plan par la transition climatique.  

Une autre catégorie de litiges liés au changement climatique sont les litiges commerciaux traditionnels, dans lesquels la transaction ou le projet commercial au cœur du litige découle de projets d'atténuation et d'adaptation au changement climatique, par exemple le déploiement de solutions énergétiques à faible émission de carbone. Du point de vue du changement climatique, l’un des principaux défis de ces différends est de parvenir à une résolution rapide du différend, afin de ne pas ralentir la réalisation des objectifs d’atténuation ou d’adaptation prévus. Pour relever ce défi, nous encourageons les avocats à toujours inclure des options accélérées de règlement des différends, ou médiation, lorsque la stratégie de l'affaire est décidée. 

Une table ronde s'est intéressée à la résolution des différends sur les marchés du carbone, quelles ont été les principales conclusions ? 

Comprendre les différentes perspectives des acteurs sur les marchés volontaires du carbone, c'est-à-dire. celle des investisseurs, des développeurs de projets, des acheteurs de crédits carbone sur le marché ou des organismes tiers de normalisation volontaire qui génèrent, vérifient, émettent et transfèrent des crédits carbone, sera déterminante pour une résolution efficace des litiges qui pourraient survenir. Une multitude de relations contractuelles sont impliquées, et il est probable que cela nécessitera une expertise spécifique et assez avancée.  

Les marchés volontaires du carbone sont encore en phase de développement et leur efficacité est parfois remise en question. En fin de compte, il s’agit d’utiliser les forces du marché pour atténuer le changement climatique. Je crois qu’il est important de toujours garder cet objectif primordial à l’esprit à mesure que les marchés se développent et s’adaptent aux nouvelles circonstances. Des marchés volontaires du carbone efficaces et intègres ont un grand potentiel pour devenir un élément important permettant à la communauté mondiale de parvenir à une croissance économique tout en restant dans les limites planétaires. 

 Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier)

Annette Magnusson

Annette Magnusson est la cofondatrice de Climate Change Counsel, un groupe de réflexion et d'action dont la mission est de mobiliser le droit et les avocats en faveur de l'action climatique. Elle possède plus de 20 ans d’expérience en droit international, notamment au sein de cabinets d’avocats internationaux. Avant de cofonder Climate Change Counsel, Mme Magnusson a été secrétaire générale de l'Institut d'arbitrage de la Chambre de commerce de Stockholm (SCC) pendant plus de dix ans. Dans sa pratique, Mme Magnusson se concentre sur le leadership et le plaidoyer politique et travaille avec les clients et les parties prenantes pour soutenir le renforcement des capacités et la transition. Mme Magnusson intervient fréquemment sur le droit international, les litiges et le changement climatique, et a été répertoriée comme leader d'opinion et leader mondial dans Who's Who Legal, et « leader d'opinion et star mondiale » par Global Arbitration Review. Elle est l'auteur ou l'éditrice de plusieurs publications, dont Investment Arbitration and Climate Change (à paraître en 2023), International Arbitration in Swedish – A Practitioner's Guide (2 éd. 2021) et Arbitrating for Peace (2017). 


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