Outrage à magistrat : le caractère rapportable des propos prévaut

Magistrat
Outils
TAILLE DU TEXTE

L'outrage à magistrat est caractérisé lorsque l'auteur des propos outrageants sait qu'ils seront rapportés à la personne visée, peu important que les propos revêtent un caractère public.

Un homme a été poursuivi devant le tribunal correctionnel notamment du chef d'outrages à magistrat commis par des publications sur sa page Facebook au préjudice d'une juge aux affaires familiales qui intervenait dans le litige opposant le prévenu à son ex-compagne relativement à leur enfant commun.

Pour infirmer le jugement ayant retenu la culpabilité du prévenu du chef d'outrages à magistrat et débouter la partie civile de ses demandes, la cour d'appel d'Agen a rappelé que, lors d'une audience, cette dernière avait évoqué les publications du prévenu sur sa page Facebook relatives au litige en cours et que celui-ci avait annoncé vouloir les poursuivre tant que l'enfant ne lui serait pas rendu.
Les juges du fond ont constaté que, par la suite, l'intéressé avait diffusé, par ce même canal, une vidéo qui le montrait lisant la décision de justice rendue par cette juge en l'accompagnant de propos tels que "vous êtes des guignols, des nuls, imperformants, inefficaces, dangereux, vous êtes dangereuse madame la juge", en la qualifiant de "folle" et "criminelle" et en ajoutant "ça va très mal se passer (...) je vous le dis madame la juge, je vous le dis dans les yeux".
Les juges ont ajouté qu'il n'était pas contesté que les faits d'outrage reprochés avaient été réalisés par le prévenu sur sa page de ce réseau social ouverte au public. Ils en ont conclu que les paroles outrageantes avaient été rendues publiques, de sorte que l'infraction d'outrage n'était pas caractérisée.
Pour les juges d'appel, une requalification des faits devait être écartée dès lors que la juridiction saisie n'était pas autorisée à substituer à la qualification de droit commun adoptée par la partie poursuivante une qualification empruntée à la loi sur la liberté de la presse.

La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel le 25 mars 2025 (pourvoi n° 23-85.517) au visa de l'article 434-24 du code pénal en rappelant que toute expression outrageante, qu'elle s'adresse directement ou par la voie d'un rapporteur nécessaire à un magistrat de l'ordre judiciaire, dans l'exercice de ses fonctions ou à l'occasion de cet exercice, entre dans les prévisions de ce texte, même si elle présente un caractère public.
Ainsi, la cour d'appel ne pouvait relaxer le prévenu au seul motif que les propos litigieux présentaient un caractère public. Il lui appartenait de rechercher, alors qu'elle constatait que la partie civile savait que le prévenu postait sur son compte Facebook des messages relatifs à la procédure, si les propos litigieux, la prenant explicitement à partie, ne s'adressaient pas directement à elle, auraient-ils même été tenus publiquement.

© LegalNews 2025