Antoine Louche, avocat, éclaire Le Monde du Droit sur l’office du juge en matière de responsabilité médicale.
En l'absence de présentation d'une offre de l'assureur ou de l'ONIAM ou à défaut d'acceptation de cette offre, la procédure de règlement amiable prévue par les dispositions rappelées ci-dessus n'a pu aboutir, la victime conserve le droit d'agir en justice devant la juridiction compétente contre un établissement public de santé, si elle estime que sa responsabilité est engagée, ou contre l'ONIAM, si elle estime que son dommage est indemnisable au titre de la solidarité nationale.
Si le dommage dont il est demandé réparation peut être indemnisé au titre de la solidarité nationale, les dispositions de l’article L. 1142-20 du code de la santé publique n’ont ni pour objet ni pour effet d’instituer un droit d’agir en justice contre l’ONIAM au titre de dommages engageant la responsabilité d’un établissement public de santé si l’office n’a pas formulé d’offre d’indemnisation ou si cette dernière n’a pas été acceptée.
En pareille hypothèse, il appartient au juge de reformuler d’office les éventuelles conclusions qui seraient dirigées contre l’ONIAM et de regarder ces dernières comme étant en réalité dirigées contre l’établissement public de santé.
En l’espèce, une femme est décédée en 2003 au centre hospitalier général d’Hyères après avoir donné naissance à un enfant. Son compagnon a alors saisi la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des victimes des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) de Provence-Alpes-Côte d’Azur en son nom propre et comme représentant légal de l’enfant né. La CRCI a estimé que le centre hospitalier avait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité.
Face à l’absence de proposition d’indemnisation dudit centre, l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des infections nosocomiales et des affections iatrogènes (ONIAM) a formé une offre auprès de l’intéressé en réparation des préjudices qu’avait entrainés pour lui le décès de sa compagne et une seconde offre pour l’enfant né.
Si l’intéressé a accepté la première offre le concernant, estimant qu’elle ne concernée que son préjudice moral, il a renoncé à percevoir le montant prévu par la seconde offre, sur laquelle il avait pourtant apposé sa signature.
Ce dernier a demandé que ses autres préjudices personnels ainsi que ceux de sa compagne et de leur enfant soient mis à la charge de l’ONIAM. L’intéressé a saisi le Tribunal administratif de Toulon d’une action indemnitaire sur ce point.
Par jugements en date du 17 septembre 2009, ledit Tribunal a rejeté la première demande et a fait partiellement droit à la seconde.
Par un second jugement en date du 2 juin 2010, le même Tribunal a fait droit à la demande de l’ONIMA tendant au remboursement par le centre hospitalier d’Hyères des sommes versées à l’intéressé.
Il a été interjeté appel de ces trois jugements. Par un arrêt en date du 17 octobre 2011, la Cour administrative d’appel de Marseille a condamné l’ONIAM a versé au conjoint de la victime une indemnité de 22 000 € au titre de son préjudice économique outre les frais non compris dans les dépens, et a également condamné l’office à verser à ce dernier, en sa qualité de représentant légal de l’enfant né une somme de 11 000 € au titre de son préjudice économique.
Toutefois, la Cour marseillaise a rejeté les conclusions de l’intéressé relatives au préjudice moral de l’enfant et aux préjudices subis par sa compagne. Enfin, la Cour a condamné le centre hospitalier à verser une somme de 17 900 € à l’ONIMA.
Ledit centre a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’ensemble des arrêts rendus.
Dans le cadre du pourvoi concernant l’indemnisation du préjudice de l’ONIMA, la Haute Assemblée a dégagé un nouveau principe en ce domaine.
Ainsi, en l'absence de présentation d'une offre de l'assureur ou de l'ONIAM ou à défaut d'acceptation de cette offre, la procédure de règlement amiable prévue par les dispositions rappelées ci-dessus n'a pu aboutir, la victime conserve le droit d'agir en justice devant la juridiction compétente contre un établissement public de santé, si elle estime que sa responsabilité est engagée, ou contre l'ONIAM, si elle estime que son dommage est indemnisable au titre de la solidarité nationale.
Si le dommage dont il est demandé réparation peut être indemnisé au titre de la solidarité nationale, les dispositions de l’article L. 1142-20 du code de la santé publique n’ont ni pour objet ni pour effet d’instituer un droit d’agir en justice contre l’ONIAM au titre de dommages engageant la responsabilité d’un établissement public de santé si l’office n’a pas formulé d’offre d’indemnisation ou si cette dernière n’a pas été acceptée.
En pareille hypothèse, il appartient au juge de reformuler d’office les éventuelles conclusions qui seraient dirigées contre l’ONIAM et de regarder ces dernières comme étant en réalité dirigées contre l’établissement public de santé.
A cet égard, il pourra, le cas échéant, être nécessaire de mettre en cause cet établissement public.
En effet, l’ONIAM, qui ne forme une offre d’indemnisation qu’en raison de la carence de l’établissement public de santé ou de son assureur, ne saurait voir sa responsabilité engagée à ce titre. La substitution de l’office ne portant que sur l’offre d’indemnisation.
Faisant application du principe qu’elle venait de dégager, la Haute Assemblée a censuré pour erreur de droit l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Marseille.
Le Conseil d’Etat a renvoyé les affaires en cause devant la Cour administrative d’appel de Marseille.
Référence : CE, 6 novembre 2013, Centre hospitalier général d’Hyères, n°355030
Antoine Louche, Avocat au barreau de Lyon