Régime juridique des TUP : les récentes modifications apportées aux règles de publications lourdes de conséquences sur le calendrier des opérations

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La chasse aux fraudeurs fiscaux est ouverte et le gouvernement n'hésite pas à sortir l'artillerie lourde, quitte à bouleverser, au passage, le régime juridique des dissolutions sans liquidation (TUP) ! Un décret du 7 juillet 2024 impose désormais la publication de TUP au BODACC en lieu et place d’un avis dans un support d’annonces légales. Cette modification qui pourrait sembler, à première vue, de pure forme entraine des conséquences pratiques significatives. Le point avec Clément Mogavero, avocat counsel et Alicia Medina, stagiaire, cabinet Delsol Avocats.

La chasse aux fraudeurs fiscaux est ouverte et le gouvernement n'hésite pas à sortir l'artillerie lourde, quitte à bouleverser, au passage, le régime juridique des dissolutions sans liquidation (TUP) ! Un décret du 7 juillet 2024 impose désormais la publication de TUP au BODACC en lieu et place d’un avis dans un support d’annonces légales. Cette modification qui pourrait sembler, à première vue, de pure forme entraine des conséquences pratiques significatives.  

Nous rappelons que la TUP (régie par l’article 1844-5 alinéa 4 du Code civil) est une procédure de dissolution bien connue des acteurs du droit des sociétés et qui est applicable aux sociétés dont l'associée unique est une personne morale. Fortement utilisée dans le cadre de restructurations internes de groupes, elle permet la transmission intégrale des éléments d'actif et du passif (sauf contrats conclus intuitu personae) de la société dissoute à l’associée unique, sans nécessiter de liquidation. Au fil des années, la TUP s’est donc imposée comme un outil rapide et simple de restructuration interne au sein des groupes de sociétés par rapport aux fusions simplifiées (qui nécessitent, notamment, la rédaction d’un traité de fusion et la prise de décisions sociales) ou aux liquidations classiques. A l’instar du régime des fusions, la TUP est soumise à un délai d’opposition des créanciers de la société concernée. Toutefois, elle se distinguait jusqu’alors de la fusion en raison de ses modalités spécifiques de publication à effectuer dans un journal ou support d’annonces légales (JAL/ SHAL) et non au BODACC. Toutefois, cette méthode de publication n’était pas toujours très visible des créanciers de la société confondue et pouvait donc échapper à leur vigilance.

Aussi, un nouveau décret n° 2024-751 du 7 juillet 2024 impose désormais la publication de la dissolution au BODACC, remplaçant ainsi la publication dans un JAL/SHAL prévue par l’article 8 du Décret n°78-704 du 3 juillet 1978. Cette mesure entrera en vigueur au 1er octobre 2024. L’objectif visé par le Ministère de l’Economie et des Finances, à l’initiative de cette modification, est notamment d’assurer une meilleure transparence pour les créanciers de la société confondue et ainsi de lutter contre la fraude fiscale. Cette modification doit être saluée mais elle s’accompagne de défis significatifs à relever pour les groupes souhaitant procéder à de telles restructurations juridiques internes.  

En effet, dans la mesure où la publication dans un JAL/ SHAL marquait le point de départ du délai d’opposition des créanciers (en l’occurrence le délai commençant à courir le lendemain de la publication), elle constituait un vecteur de prévisibilité de réalisation juridique d’une TUP, d’autant plus utile que la TUP ne bénéficie pas de la rétroactivité comptable et juridique. Grâce à l’usage des calendriers de publications annuels diffusés par les JAL, il était relativement facile d’anticiper le calendrier d’une TUP et l’expiration du délai d’opposition des créanciers. Ainsi, les entreprises concernées et leurs conseils pouvaient piloter, main dans la main avec les professionnels des JAL, la préparation d’une TUP et « programmer » à l’avance la date de réalisation de l’opération. Or, en retenant désormais l’insertion au BODACC comme point de départ du délai d’opposition des créanciers, le décret du 7 juillet 2024 réduit l’un des avantages de la TUP puisque la gestion de la publication au BODACC sera désormais à la seule main des Greffiers des Tribunaux de commerce. A compter du 1er octobre 2024, les délais de réalisation des TUP ne pourront donc plus être maîtrisés comme auparavant. 

Aussi, le décret du 7 juillet 2024 pourrait amener les entreprises et praticiens à reconsidérer l’usage de la TUP et à explorer d’autres alternatives de restructurations, telle la fusion simplifiée à 100%. En effet, si le point de départ du délai d’opposition des créanciers applicable aux fusions simplifiée est bien la date de l’insertion au BODACC, l’opération bénéficie de la rétroactivité comptable, fiscale et juridique (voire, le cas échéant, d’un effet différé d’un point de vue juridique).   

Avec cette nouvelle réforme, le gouvernement resserre les mailles du filet contre la fraude fiscale et redéfinit les règles du jeu des TUP. Autrefois souvent utilisées pour leur simplicité et leur discrétion, ces opérations seront désormais sous le feu des projecteurs et soumises à des contraintes de temporalité accrues. Il est donc recommandé que les groupes de sociétés souhaitant réaliser des TUP anticipent, notamment avec l’appui de leurs conseils, au maximum les délais de publication au BODACC afin de minimiser les incertitudes et les risques liés à ces nouvelles règles.  

Clément Mogavero, avocat counsel et Alicia Medina, Stagiaire, cabinet Delsol Avocats


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