La Cour de cassation, qui exige, à peine d’irrecevabilité, la présentation d’un recours par voie électronique en dépit des obstacles pratiques auxquels se heurte le requérant, fait preuve d'un formalisme excessif et méconnaît le droit d’accès au juge garanti par l’article 6 § 1 de la Convention.
La Cour européenne des droits de l'Homme a été saisie d'une affaire concerne l’obligation de saisir la cour d’appel par voie électronique, via la plateforme ebarreau.
Alors que la cour d’appel avait admis la recevabilité du recours en annulation d’une
sentence arbitrale présenté, sur papier, par le requérant au motif que le formulaire informatique mis en ligne ne permettait pas de saisir la nature de ce recours et la qualité des parties, la Cour de cassation a jugé au contraire qu’il aurait dû être remis par voie électronique.
La Cour note que le requérant fait valoir qu’il lui était matériellement impossible de saisir le recours sur la plateforme e-barreau.
Elle constate que la remise par voie électronique du recours en annulation sur e-barreau supposait que l’avocat du requérant complète le formulaire en utilisant des notions juridiques impropres. Elle relève en outre que le gouvernement ne démontre pas que des informations précises relatives aux modalités d’introduction du recours litigieux se trouvaient à la disposition des utilisateurs.
La Cour considère en l’espèce qu’en faisant prévaloir le principe de l’obligation de communiquer par voie électronique pour saisir la cour d’appel sans prendre en compte les obstacles pratiques auxquels s’était heurté le requérant pour la respecter, la Cour de cassation a fait preuve d’un formalisme que la garantie de la sécurité juridique et de la bonne administration de la justice n’imposait pas et qui doit, dès lors, être regardé comme excessif.
Elle conclut que le requérant s’est vu imposer une charge disproportionnée qui rompt le juste équilibre entre, d’une part, le souci légitime d’assurer le respect des conditions formelles pour saisir les juridictions et d’autre part le droit d’accès au juge.
Dans un arrêt Xavier Lucas c/ France du 9 juin 2022 (requête n° 15567/20), la Cour européenne des droits de l'Homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 (accès à un tribunal) de la Convention européenne des droits de l’Homme.