Alors qu'a lieu aujourd’hui le colloque du barreau de Paris « Faire avancer les droits des femmes : coopération internationale, coopération interprofessionnelle » dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes, Nathalie Roret, vice-bâtonnière de Paris, revient sur les enjeux de cette journée et évoque les sujets de son début de mandat.
Quels sont les enjeux de cette journée ?
D'abord, c’est le premier événement public que le barreau de Paris donne depuis le début de notre mandat. La question de la progression des droits des femmes est fondamentale. En effet, notre profession est composée en majorité de femmes qui connaissent toutes les difficultés que peuvent connaître les femmes dans un environnement professionnel (inégalités de rémunération, pratiques de harcèlement ou de discriminations…).
Ensuite, nous abordons aujourd’hui ce sujet avec un regard international avec la présence Sima Samar, défenseuse des droits afghane, ancienne Présidente de la Commission indépendante pour les droits de l'homme en Afghanistan et ancienne rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits de l’homme au Darfour apportera son témoignage. Elle s’est notamment mobilisée en Afghanistan pour les femmes juristes qui n’ont toujours pas l’autorisation d’être des avocates. Nous allons réfléchir ensemble à la venue de juristes afghanes dans nos cabinets d’avocats.
Enfin, nous aborderons également la coopération interprofessionnelle avec les magistrats sur les enjeux de l’accès au droit pour les victimes de violences conjugale. A cette occasion, la plateforme numérique Droitdirect.fr, qui permet en toute sécurité à une femme victime de violences d’avoir toutes les informations et les contacts pour faire connaître ses droits et les faire valoir, sera présentée.
Pouvez-vous évoquer l’Observatoire de l’Egalité et de la lutte contre les discriminations qui fait partie des priorités de votre mandat ?
L’Observatoire de l’égalité et de la lutte contre les discriminations doit permettre de travailler de manière « scientifique » en fournissant des études statistiques comparatives sur ce sujet. A partir de là, nous mènerons une réflexion avec des personnalités de la société civile pour avoir un regard transversal et faire progresser les choses plus rapidement. Nous devons aussi travailler ces questions en amont dès l’EFB.
Quels sont les autres sujets sur lesquels vous travaillez actuellement ?
D'une façon plus globale, nous nous intéressons aux questions d'éthique à la faveur du déménagement des services de l'Ordre dans la nouvelle Maison des avocats. Nous allons suivre une procédure ISO 26.000. C'est une façon d'apprécier une organisation en fonction de l'éthique, la loyauté de ses pratiques, la responsabilité sociétale, la responsabilité environnementale, la lutte contre la corruption...
Je trouve que c'est une façon structurée et structurante de travailler ensemble. Cela va nous permettre de réunir tous les services à partir d'un process bien établi.
En outre, avec la transposition de la directive du 30 mai 2018 du Parlement européen et du Conseil, dite "5ème directive anti-blanchiment" transposée le 12 mai 2020, les obligations des avocats sont renforcées en matière de lutte contre le blanchiment et de financement du terrorisme. Nous allons organiser des formations pour être mesure de répondre à ces nouvelles obligations.
C'est important pour la profession, car ce qui va être apprécié c'est notre capacité à nous autoréguler dans le cadre de l'inspection de la France en juillet prochain par le Gafi.
Un dernier mot sur les retraites qui occupent le début de votre mandat ?
Le barreau de Paris vient de voter une reconduction de la grève jusqu'au 25 mars. C'est un message assez fort adressé au Gouvernement après la décision de recourir à l'article 49.3 de la Constitution sur la réforme des retraites. La mobilisation se fait par l'organisation de « défenses massives » qui regroupent de plus en plus d'avocats. La semaine dernière, on dénombrait près de 150 avocats. Cela permet de pointer le doigt sur l'absence de moyens de la justice. Alors qu'habituellement on compte un avocat pour quatre dossiers, nous avons avec la procédure de « défense massive » le postulat inversé avec quatre avocats pour un dossier.
Propos recueillis par Arnaud Dumourier (@adumourier)