Les clés d’une stratégie probatoire efficace à l'ère numérique

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Pour les professionnels du droit, notamment les avocats et juristes d’entreprise, la capacité à produire des preuves est le socle sur lequel repose toute stratégie de contentieux. Qu'il s'agisse de défendre une position ou d'attaquer une partie adverse, tout se joue sur la capacité à rassembler des éléments solides et admissibles devant les instances compétentes. Dans un conflit, la difficulté réside souvent dans l’art de prouver la validité de ses propres arguments tout en pointant les failles des preuves adverses. Avec la montée en puissance des technologies numériques, cet exercice devient d’autant plus délicat que les preuves sont désormais faciles à produire... mais aussi à falsifier.

Contrats dématérialisés, échanges instantanés, documents stockés dans le cloud : les sources de preuve se multiplient et complexifient la tâche des juristes. Face à cette réalité, les méthodes traditionnelles de gestion des dossiers de preuve atteignent leurs limites. Pour s'adapter à ce nouvel écosystème, il devient impératif de repenser la stratégie probatoire en intégrant des outils et des pratiques adaptés.

L’objectif est de garantir la fiabilité et la recevabilité des preuves tout au long de leur cycle de vie, de leur collecte à leur production, en passant par leur conservation. Pour cela, il faut combiner organisation rigoureuse et recours à des outils technologiques adaptés, capables de répondre aux enjeux techniques et juridiques.

Comprendre les enjeux numériques actuels

Sous l’effet de la transformation numérique des entreprises, les règles du jeu en matière de preuve sont bouleversées et les juristes doivent relever de nouveaux défis : comment assurer la validité d'un document électronique en cas de litige ? Quels critères doivent être remplis pour que ces preuves soient acceptées par les tribunaux ?

En France, un document numérique aura la même valeur probante que son équivalent papier, à condition que son auteur soit identifiable et que son intégrité soit garantie. À l'échelle européenne, le règlement eIDAS établit un cadre commun pour la reconnaissance des preuves numériques grâce à des mécanismes tels que l'horodatage qualifié ou la signature électronique. Ces outils, fournis par des prestataires de service de confiance qualifiés - PSCo, comme Evidency, confèrent une valeur probante maximale aux documents qu’ils certifient et en renforcent donc la recevabilité.

Identifier les risques et vulnérabilités

Pour répondre à ces défis, la première étape à effectuer doit être de qualifier le niveau de force probante requis au regard du risque de contentieux. Selon le type de documents concernés (contrats commerciaux, dossiers de ressources humaines, données de R&D), les exigences probatoires varieront en effet. Cette cartographie préalable permet de prioriser les efforts et les ressources sur les éléments les plus stratégiques.

La cartographie permettra également d’identifier les éléments de preuve les plus à risque face à de nouvelles menaces, comme les usurpations d’identités rendues possibles via la technologie du deepfake. Ces évolutions technologiques imposent donc une vigilance accrue aux juristes pour garantir l’intégrité des preuves numériques et distinguer le vrai du faux.

Adopter des pratiques adaptées

Pour renforcer la validité des preuves numériques, plusieurs pratiques s'imposent.

Tout d’abord, il faut avoir le réflexe d’horodater les documents critiques dès leur création. L’horodatage qualifié, fourni par des prestataires de services de confiance comme Evidency, atteste avec certitude la date et l’heure d’existence d’un fichier tout en en préservant l’intégrité. Le recours à un prestataire qualifié eIDAS pour l’horodatage permet ainsi de constituer une preuve irréfutable.

Ensuite, il est souvent requis d’être en mesure de pouvoir démontrer l’origine et l’intégrité des preuves produites. Des solutions de signature ou de cachet électroniques sont utilisées à ces fins. La signature électronique offre la possibilité à des individus de signer en leur nom, tandis que le cachet électronique, équivalent numérique du tampon d’entreprise, permet d’apposer une signature au nom d’une organisation ou d’une société. Ces outils, lorsqu’ils sont qualifiés par eIDAS, confèrent aux documents une valeur juridique égale à celle d’une signature ou d’un tampon manuscrit.

Enfin, l’intégrité des documents doit être assurée dans la durée. Cela passe par l’utilisation de systèmes d’archivage électronique qualifiés, respectant des normes telles que ISO 14641-1. Ces systèmes garantissent la traçabilité, la lisibilité et l’intégrité des documents archivés sur la durée, tout en leur conférant une valeur juridique incontestable.

Préparer la production des preuves

Si la constitution et la conservation d’un dossier de preuves adapté aux enjeux constitue la base d’une stratégie probatoire efficace, il faut également avoir établi au préalable les modalités pratiques pour récupérer et produire ces preuves lorsque cela est nécessaire, en maintenant les conditions d’intégrité et de traçabilité requises. Il faut être ainsi capable d’expliquer où et comment étaient stockées les données, qui y a eu accès, et prouver ainsi que le document n’a pas pu être altéré au cours du process.

Une bonne pratique est de tester régulièrement les conditions d’accès et de restitution de la preuve, pour s’assurer de l’inaltérabilité et de la fiabilité des documents produits.

Planifier la réversibilité des données

Enfin, un aspect souvent négligé est la réversibilité des documents en fin de période d’archivage. Pouvoir extraire l’ensemble des données archivées dans un format standard, accompagné des métadonnées associées (horodatages, signatures, journaux d’accès), est indispensable pour garantir leur portabilité et répondre aux exigences de changement de prestataire ou d’intégration dans de nouveaux systèmes.

Mobiliser en interne les compétences nécessaires

La mise en place d’une stratégie probatoire numérique repose sur une collaboration étroite entre les équipes juridiques et techniques notamment.

Les responsables juridiques sont chargés de définir les enjeux probatoires et le niveau d’exigence de la recevabilité de la preuve en fonction des risques juridiques identifiés. Les équipes informatiques sont quant-à-elles chargées de trouver des solutions techniques adaptables aux systèmes informatiques existants.

Ce travail main dans la main est indispensable pour créer un véritable chemin de confiance pour les preuves dématérialisées.

Conclusion

Construire une stratégie probatoire, c'est se donner les moyens de protéger son patrimoine immatériel et de défendre ses intérêts en cas de contentieux liés au numérique, sur des sujets aussi variés que le consentement, la propriété intellectuelle ou l’identification de faux. Disposer d'une telle stratégie est donc devenu une véritable exigence pour rester compétitif à l'ère digitale.

Stéphane Père, Managing Director Evidency

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