Pour le Conseil d'Etat, les dispositions permettant d'enregistrement d'une audience en vue de sa diffusion présentent toutes les garanties en termes de protection des données personnelles, de respect de la présomption d'innocence, de protection des communications entre l'avocat et son client ou de sauvegarde de la sérénité et de la sincérité des débats.
Le Conseil national des barreaux (CNB), le Syndicat des avocats de France et le syndicat CFDT-Magistrats ont saisi le Conseil d'Etat en vue de l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2022-462 du 31 mars 2022 pris pour l'application de l'article 1er de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire.
Ces dispositions autorisent, par dérogation au premier alinéa de l'article 38 ter de la loi précitée, l'enregistrement sonore ou audiovisuel d'une audience pour un motif d'intérêt public d'ordre pédagogique, informatif, culturel ou scientifique, en vue de sa diffusion.
Dans un arrêt rendu le 30 avril 2024 (requête n° 464500), le Conseil d'Etat rejette les requêtes.
Il considère tout d'abord que le Premier ministre n'était pas tenu de consulter la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) avant l'adoption du décret : ses dispositions ne déterminent pas elles-mêmes, dans leurs caractéristiques essentielles, les formalités de création ou les conditions de mise en œuvre d'un traitement de données à caractère personnel.
Le Conseil d'Etat écarte ensuite le moyen tiré du manque de précision du motif permettant d'autoriser l'enregistrement d'une audience juridictionnelle en vue de sa diffusion, en précisant notamment que la demande d'autorisation d'enregistrement de l'audience, adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, précise le motif qui la justifie et est accompagnée d'une description circonstanciée du projet éditorial.
Il rejette également le moyen tiré de ce que le décret attaqué n'aurait pas entouré l'enregistrement des audiences de garanties propres à assurer la sauvegarde de la sérénité et de la sincérité des débats.
En ce qui concerne la protection des communications entre l'avocat et son client, la Haute juridiction administrative estime que le texte attaqué a prévu les garanties nécessaires à la préservation du secret des propos échangés à l'audience entre les avocats et leurs clients. Il ne porte pas atteinte au droit à un procès équitable ni au secret professionnel.
S'agissant de la présomption d'innocence, le Conseil d'Etat considère que le décret en litige apporte des précisions suffisantes quant à la notion d'affaire définitivement jugée.
Il écarte enfin les griefs ayant trait au droit au respect de la vie privée et le droit à l'image, aux modalités de décision au sein des juridictions judiciaires, aux modalités de recueil du consentement des parties ainsi qu'à la diffusion des audiences devant le Conseil d'Etat et la Cour de cassation.
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