Responsabilité civile professionnelle de l’avocat en cas de recours voué à un échec certain ou abusif

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Si l'avocat est tenu d'une obligation de conseil quant à l'opportunité de former appel d'une décision, il n'engage sa responsabilité professionnelle que dans l'hypothèse où ce recours est voué à un échec certain ou est abusif.

Invoquant des dysfonctionnements affectant une chaîne de calibrage d'huîtres acquise auprès d'un vendeur, l'acquéreur a confié la défense de ses intérêts à l'avocat. 
Après expertise, un tribunal de commerce a retenu la responsabilité du vendeur sur le fondement du défaut de conformité de la chose vendue, l'a condamné à payer à l'acquéreur une certaine somme à titre de dommages-intérêts et a rejeté la demande de garantie formée à l'encontre de la société, assureur du vendeur, le défaut de conformité ne relevant pas des risques couverts par le contrat d'assurances. 
Cette décision a été réformée en appel et la demande de l'acquéreur rejetée, au motif que celle-ci était exclusivement fondée sur le vice caché, lequel n'était pas caractérisé au regard des constatations de l'expert judiciaire. 
L'acquéreur a assigné l'avocat en responsabilité civile professionnelle et indemnisation.

La cour d’appel d’Agen condamne l'avocat à indemniser l'acquéreur au titre de la perte de chance de percevoir les dommages-intérêts qui lui avaient été alloués par le premier juge. Les juges du fond retiennent que l’avocat aurait dû conseiller à son client d'accepter lesdites sommes, même si elles étaient inférieures à ses prétentions, et qu'en tout état de cause, l'avocat a commis une faute en renonçant à fonder le recours, au moins subsidiairement, sur le défaut de délivrance conforme retenu en première instance

Le 20 décembre 2017, la Cour de cassation casse l’arrêt au visa des articles 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et les articles 1604 du même code et 455 du code de procédure civile.
Si l'avocat est tenu d'une obligation de conseil quant à l'opportunité de former appel d'une décision, il n'engage sa responsabilité professionnelle que dans l'hypothèse où ce recours est voué à un échec certain ou est abusif. S'il doit tout mettre en œuvre pour assurer la défense des intérêts de son client, notamment en développant tous les moyens de droit au soutien de ses prétentions, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir soulevé un moyen de défense inopérant.
En se déterminant ainsi, sans répondre au moyen tiré du fait que la cour d'appel aurait été saisie, en toute hypothèse, dès lors que le vendeur contestait sa responsabilité et avait formé appel incident, et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le moyen relatif à la non-conformité de la machine livrée n'aurait pas été voué à l'échec en raison de la tardiveté de sa dénonciation, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

 


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